Tous les trimestres, Edouard Carmignac prend la plume pour commenter les enjeux économiques, politiques et sociaux du moment.

Tout au long de cette dernière année, je vous ai écrit que le pessimisme ambiant ne me semblait pas justifié. Si les principaux foyers d’incertitude recélaient – et recèlent encore – bien des opportunités sous-jacentes, leur accumulation était néanmoins une incitation à un optimisme mesuré. Qu’en est-il aujourd’hui?

Selon nous, les principaux sujets de préoccupation se focalisent autour des trois pôles suivants:

La soutenabilité d’un endettement mondial élevé. L’évolution de l’endettement public au cours des vingt dernières années est alarmante. En moins de vingt ans, les ratios de dette rapportée aux PNB des principaux pays développés ont doublé, dépassant dans la plupart des cas les 100 pour cent. En outre, la hausse récente des taux d’intérêt alourdit le fardeau de ces dettes et obère la solvabilité des pays emprunteurs. L’objectif modeste d’une stabilisation d’un ratio d’endettement suppose en effet que le taux de croissance soit égal au taux moyen d’intérêt payé par un Etat dans l’hypothèse de déficits publics zéro, charges d’intérêt comprises. Compte-tenu des laxismes budgétaires prévalents, l’atteinte de cet objectif est politiquement irréaliste. Aussi est-il essentiel que les taux d’intérêt réels soient le plus bas possible et en tous les cas en-deçà des taux de croissance réels, inflation déduite. Gageons que la compression des taux réels va devenir l’un des axes directeurs des politiques monétaires au cours des prochains mois, d’autant que la réduction des tensions inflationnistes redonne de la marge de manœuvre aux Banques Centrales. Ainsi, dès décembre dernier, les ténors de la FED ont signalé l’approche d’un assouplissement monétaire, sous la forme d’une baisse de taux accompagnée d’une cessation totale ou partielle de leurs ventes d’effets publics.

La résilience de l’activité mondiale. La perspective d’une baisse des taux d’intérêt est naturellement un facteur de soutien à l’ensemble de l’activité, le secteur de la construction étant particulièrement favorisé. Son impact sera amplifié par la poursuite de politiques budgétaires accommodantes, notamment aux Etats-Unis où l’échéance électorale de novembre prochain incitera l’administration démocrate à se montrer généreuse. Enfin, l’accalmie sur l’ensemble des prix des matières premières et principalement de l’énergie, accroît le pouvoir d’achat des consommateurs dont la confiance est soutenue par des marchés de l’emploi porteurs. Qui aurait pu imaginer les prix actuels du gaz naturel et du pétrole, la guerre d’Ukraine s’enlisant et le Moyen-Orient à l’état de poudrière?

Les risques géopolitiques. Nous n’avions pas envisagé un enlisement de la guerre en Ukraine, tant nos informations sur l’armée russe ne laissaient présager sa résistance aux offensives ukrainiennes. Or, l’impunité présente de V. Poutine incite Xi Jinping à mener une politique autarcique et nourrit ses ambitions taïwanaises. Enfin, la crise au Moyen-Orient avive brutalement les tensions d’une région notoirement instable, surarmée, avec des jeux d’alliances suscitant des risques d’extension des conflits à faire frémir. Si une accalmie prochaine de ces tensions est illusoire, il n’est pas déraisonnable d’escompter que le jeu des interdépendances des différentes parties en présence ne nous épargne un conflit majeur.

Qu’en est-il des perspectives des marchés? La résilience de l’activité mondiale, combinée avec des taux d’intérêt réels en baisse doit continuer à favoriser la bonne tenue des actifs risqués, que ce soit au sein des valeurs de technologie, dopées par les progrès fulgurants de l’intelligence artificielle, ou de l’univers émergent dont la sous-évaluation sera rendue encore plus criante par la baisse des taux et celle éventuelle du dollar. Enfin, l’accumulation des risques géopolitiques rend plus que légitime une exposition or dans les portefeuilles, dont l’attrait est renforcé par la poursuite de politiques budgétaires laxistes dorénavant moins contrecarrées par des politiques monétaires restrictives.

Sur cette note qui demeure prudemment optimiste, je me permets de vous présenter mes meilleurs vœux de bonheur et de prospérité.

 

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