Retour sur le contexte macro du mois de mai et sur les aventures d'Elon Musk.
Par Christophe Lhote, Senior Advisor
Le contexte macro du mois de mai
Ce mois-ci, les chiffres de l’inflation US sont ressortis beaucoup plus alarmants que prévu à 4.2% en rythme annuel contre 3.6% attendus. L’inflation «core» (hors énergie et alimentation) ressort à 0.9% sur le seul mois d’avril, et 3% sur les 12 derniers mois alors que le consensus attendait 0.3% et 2.3% respectivement. Voilà des données de nature à s’inquiéter du maintien du soutien de la FED, même si plusieurs responsables sont venus ces derniers jours réitérer la position de la banque centrale selon laquelle la hausse des prix est passagère et peut être contrée sans remettre en cause la reprise économique. De fait, le taux des Bons du Trésor à 10 ans reste sous les 1.60%: un indicateur à surveiller comme le lait sur le feu.
Elon Musk au pays du bitcoin
Sinon, arrêtons-nous un instant sur les aventures d’Elon Musk au pays du bitcoin. Résumons-nous. Début février, Elon Musk annonce avoir fait acheter pour 1.5 milliards de dollars de bitcoins à Tesla (les actionnaires ont dû apprécier…) et accepter le paiement de ses voitures avec cette cryptomonnaie.
A la mi-mai, il annonçait brutalement qu’il refusait désormais les paiements en bitcoins pour cause de risque pour l’environnement. Voilà qui nécessite déjà une explication:
Le bitcoin est une «monnaie virtuelle sécurisée par des algorithmes complexes qui consiste à résoudre des équations de plus en plus compliquées» (sic). En rémunération de ce travail de sécurisation, les intervenants, appelés «mineurs», reçoivent de nouveaux bitcoins. La hausse du cours rendant de plus en plus attractif l’intérêt pour le «minage», le nombre de mineurs s’est multiplié tout en utilisant du matériel de plus en plus puissant et énergivore: des «fermes de minage» constituées de centaines de machines en réseau tournent ainsi 24h sur 24, idéalement en Chine (65% du minage du bitcoin) où le coût de l’énergie issue du charbon est faible. C’est ainsi que le bitcoin consomme autant d’électricité par an qu’un pays comme la Suède (!) tout en polluant comme personne.
Alors, en faisant machine arrière, Elon Musk est-il devenu le porte-parole des écologistes? Pas vraiment. En fait, en participant au marché du bitcoin qui a recours massivement aux énergies fossiles, Tesla prend le risque de se voir exclue du programme américain de subventions à l’automobile électrique: des milliards de dollars de manque à gagner … Et c’est bien là toute l’ironie de l’histoire: en participant à une devise qui cherche à s’affranchir des pays et des Etats, Elon Musk s’est fait rattraper par le réalisme des subsides publics …
En attendant, qu’est-ce qui peut bien pousser Monsieur et Madame Tout-le-monde à acheter des bitcoins où Elon Musk semble faire la pluie et le beau temps à coups de tweets? Seule réponse qui nous vient à l’esprit: l’appât du gain! Revendre plus cher quelque chose qui ne représente rien de plus que du vent. Et c’est bien là une excellente nouvelle: tant qu’il y aura de la cupidité, il y aura de la volatilité, et donc des opportunités. Gordon Gekko n’est pas mort: «greed is good»!
Rédigé le 28 mai 2021