La fin du premier trimestre 2022 a sonné et avec elle l’heure de faire un premier point d’étape. Nicolas Walewski, le fondateur d’Alken Asset Management et gérant des stratégies actions de l’Alken Fund revient sur le changement d’ambiance sur les marchés et expose ses convictions pour les mois à venir.
Quelles sont les performances des fonds actions de l’Alken Fund à l’issue de ce premier trimestre 2022 que l’on peut qualifier de «surprenant et difficile»?
Sur les actions, au 13/04/22, l’Alken Fund-European Opportunities R réalisait une performance positive depuis le début de l’année de 15,16% alors que dans le même temps l’indice Stoxx Europe 600 reculait de 5,65%, ce qui représente une surperformance de 20,81%. Quant à notre fonds de petites valeurs, l’Alken Fund – Small Cap Europe R, il enregistrait sur la même période une hausse de 13,33% face à un indice STOXX Europe TMI Small Net Return en recul de 10,28% (soit une surperformance de 23,61%). Enfin, du côté, de l’Alken Fund-Absolute Return Europe I, notre fonds de performance absolue, le gain était de 10,68% sur la même période.
Comment expliquez-vous ces bons résultats?
L’an dernier nous avons mentionné à plusieurs reprises que l’écart entre les styles Value et Growth s’écartait dangereusement. Nous avons alors rappelé que cela n’était pas sans conséquence car le risque de duration augmentait de façon considérable sur les marchés financiers. Or, la plupart des investisseurs ne s’en rendaient pas compte et continuaient d’acheter la performance passée sans réaliser que la tendance risquait de s’inverser en faveur des actions sous-valorisées.
Depuis le troisième trimestre 2020 et la perspective de réouverture des économies, il nous est apparu que nous allions devoir faire face à deux grands défis.
Tout d’abord, un risque inflationniste lié à une forte augmentation de la demande pour les matières premières alors que certains secteurs souffraient de sous-investissements massifs.
Ensuite, le risque de hausse des taux d’intérêt. L’intervention massive des banques centrales a en effet conduit à une forme de «socialisation» des marchés financiers. Au plus fort de la pandémie de covid-19, la création monétaire gigantesque a entrainé une baisse importante des taux d’intérêt et dans le même temps la demande s’est fortement accrue pour les produits ou services de technologie. Ces tendances ont conduit à de profonds déséquilibres dans nos économies. Des déséquilibres qui nous semblaient difficilement soutenables sur la durée.
C’est pour cela que nous avons, par exemple, commencé à renforcer dans nos portefeuilles les valeurs liées aux matières premières dès le troisième trimestre 2020. Une position peu consensuelle alors. Mais aujourd’hui les faits semblent nous donner raison et viennent rappeler que certains investisseurs ont oublié l’adage boursier selon lequel les arbres ne montent pas jusqu’au ciel».
Comment appréhendez-vous les mois à venir au travers de votre sélection de valeurs, en particulier avec les avancées de la guerre en Ukraine?
Plutôt que de chercher une réponse à votre question dans une boule de cristal, je préfère m’appuyer sur le travail que nous continuons à réaliser chez Alken AM. Je vous dirai donc que nos portefeuilles sont diversifiés et me semblent bien positionnés pour affronter ce contexte macroéconomique compliqué. Pour ce qui concerne les titres que nous détenons, leurs multiples restent toujours très attractifs et m’inspirent confiance. Bien plus d’ailleurs que ceux de certaines valeurs vedettes des indices réputées pourtant défensives et dont je n’arrive pas à justifier les valorisations actuelles. Les excès de marché auxquels je faisais déjà référence il y a plusieurs mois ne sont toujours pas corrigés alors que la situation a totalement changé. Les prix des matières premières, dont celui du pétrole, vont rester élevés et pourtant les valorisations boursières d’un certain nombre de sociétés ne tiennent pas du tout compte de cette nouvelle donne.
Pensez-vous que l’Europe va rentrer en récession? Et face à cette éventualité, que faut-il faire dans ses portefeuilles?
Le pire n’est jamais certain mais il ne peut pas non plus être exclu. Comme je vous l’expliquais à l’instant, il va falloir se montrer très attentif aux niveaux de valorisation et très sélectif dans ses choix de valeurs. De nombreuses sociétés ont révisé et risquent de devoir encore réviser à la baisse des perspectives de développement élaborées dans un contexte de marché tout à fait différent.
Parmi les entreprises les plus exposées au retour de l’inflation figurent celles du secteur de la consommation discrétionnaire bénéficiant d’une faible élasticité à la demande mais aussi certains titres de la technologie. Certains ont en effet encore tendance à sous-estimer l’impact inflationniste dans le secteur technologique. Pourtant, certains projets devront être reportés voire annulés dans les mois qui viennent.
Du côté des valeurs à privilégier, l’accent devra être mis sur les sociétés aux valorisations raisonnables et peu sensibles à la hausse des matières premières. Vous l’aurez compris, les circonstances de marché actuelles favorisent les gestions fondamentales comme la nôtre face aux gestion passives ou benchmarkées.