Sur le papier, la BCE et la Réserve fédérale américaine (Fed) se ressemblent beaucoup, les baisses de taux au cours des six derniers mois y ont été faites en proportion équivalente.
Par Kevin Thozet, membre du comité d’investissement
La BCE
La décision de la Banque centrale européenne (BCE) devrait être relativement claire à l’approche de sa réunion de politique générale cette semaine. La zone euro devrait maintenir sa trajectoire de croissance modérée au cours des prochains trimestres, avec la hausse progressive des dépenses de consommation; la désinflation et la baisse des taux d’intérêt augmentant le pouvoir d’achat des ménages. Si l’environnement économique reste tépide, la BCE devrait ramener ses taux directeurs à un niveau neutre de 2% d’ici l’été.
Ces dernières semaines, les principaux indicateurs macroéconomiques se sont améliorés, mais les bonnes nouvelles au sein des indices PMI des directeurs d’achats sont trop largement liées à un rattrapage français – où l’on partait de niveaux très bas – et les disparités entre les pays de la région cachent des réalités divergentes. Par exemple, l’Espagne croît à un rythme plus important que les États-Unis et l’Allemagne flirte toujours avec la récession, notamment dans le secteur manufacturier. En outre, le nombre croissant de gouvernements divisés ou minoritaires au sein de la zone induit une faible visibilité tant au niveau des dépenses budgétaires qu’à celui de la confiance du secteur privé ; de même la probabilité de voir aboutir des projets de financement commun au niveau européen est à ce jour extrêmement faible.
Le rythme de désinflation s’est quelque peu calmé, les salaires élevés en Allemagne et le «rattrapage» de certaines composantes ont maintenu l’inflation de base à un niveau élevé localement ; mais ces facteurs devraient s’atténuer à mesure que nous avançons dans l’année.
L’inflation sous-jacente devrait converger vers le seuil de 2% cette année, conformément à l’objectif de l’institution de Francfort.
La BCE devrait ainsi poursuivre son rythme de baisse de taux successifs. En l’état, il semble acquis de la voir réduire ses taux de politique monétaire de 25 points de base lors des deux prochaines réunions (30 janvier et 3 mars).
A compter du mois de mars, ce n’est plus si évident. Le rythme de baisse des taux pourrait ralentir et s’orienter vers un pas trimestriel.
Les projections de croissance et d’inflation des services de la BCE seront publiées début mars, procurant aux membres du Conseil des gouverneurs davantage d’éléments pour déterminer la meilleure voie à suivre.
En effet, sur le front de l’inflation, la combinaison de la hausse des prix du pétrole (+10% sur 3 mois) et du gaz (+15% sur 3 mois) ainsi que la baisse de l’euro (-3% sur 3 mois) pourrait entraîner une hausse des anticipations d’inflation à court terme (jusqu’à +0,50% selon nos estimations).
Et d’ici là, l’incertitude sur le front de la croissance pourrait bien s’être dissipée voire se retourner d’un pis-aller à une situation bien plus favorable. Cela pourrait se matérialiser par des anticipations plus optimistes et des surprises positives sur le front des publications de résultats. Les élections allemandes pourraient déboucher sur une coalition resserrée dont le programme serait favorable aux entreprises et adopterait une approche moins restrictive en termes de contraintes budgétaires. En outre, un président américain moins vindicatif qu’initialement craint ou encore un apaisement des tensions en Ukraine laisseraient également entrevoir un horizon plus dégagé et bénéfique.
Enfin, les niveaux record d’émissions d’obligations souveraines en Espagne, en Italie et même en France ont été bien absorbés par les marchés obligataires, et cela en dépit d’un resserrement quantitatif qui se poursuit à plein régime.
Tous ces facteurs plaident en faveur d’un abaissement plus progressif des taux directeurs, sur un pas trimestriel. Ceci est d’autant plus important que la politique monétaire de la BCE s’approche de la neutralité – certains affirment que ce taux neutre se situerait dans une fourchette allant jusqu’aux niveaux de 2,5% qui à ce rythme seront atteints au mois de mars – et appelle ainsi à un rythme d’assouplissement plus mesuré.
La Fed
Sur le papier, la BCE et la Réserve fédérale américaine (Fed) se ressemblent beaucoup, les baisses de taux au cours des six derniers mois y ont été faites en proportion équivalente. Mais contrairement à la zone euro, l’économie américaine s’est avérée extrêmement résiliente et devrait continuer de croître à un rythme annualisé de 2,7 %. Les ventes au détail et la production industrielle se maintiennent et même l’immobilier montre des signes d’amélioration.
La dépendance aux données chère à Monsieur Powell devrait amener la Fed à ses taux directeurs inchangés, entre 4,25 et 4,50%. Cette pause, après trois baisses de taux consécutives, permettra au président de la Fed et à ses membres de mieux apprécier l’impact de sa politique monétaire, toujours en territoire restrictif, sur l’économie. Elle permettra également à la banque centrale de faire face à l’incertitude « Trumpienne », lui laissant davantage de temps pour évaluer l’impact des premiers décrets présidentiels, de l’invocation de la loi d’urgences nationales et de la faisabilité de son très grand projet de loi.
Tant que l’économie et le marché du travail américains restent aussi solides, la Fed peut se permettre d’être patiente. D’autant plus que les dernières publications d’inflation étaient plutôt bénignes; rassurant probablement la Fed sur les pressions sous-jacentes sur les prix. Et cela sans même compter sur le potentiel impact déflationniste des derniers développements en matière d’intelligence artificielle ; qu’ils soient liés à la baisse des coûts de modélisation ou au développement de modèles « open-source » (c’est-à-dire dont le code source est adaptable et modifiable librement) qui favorise l’adoption de l’intelligence artificielle à moindre coût.
Alors que les marchés anticipent à peine deux baisses de taux d’intérêt pour l’année outre atlantique et que les obligations d’État américaines à deux ans ont enfin retrouvé leur attrait, nous pensons que les taux d’intérêt américains sont plus attractifs que leurs homologues européens.
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