Le fonds Argonaut célèbre ce mois-ci ses 20 années d’existence. C’est l’occasion pour nous de revenir sur les deux décennies passées, avec quelques chiffres et quelques anecdotes…

Par Philip Best, co-gérant

 

Quelques chiffres

Philip Best

Le chiffre le plus important, en tout cas du point de vue de l’investisseur, c’est sans nul doute celui de la performance. Avec une performance cumulée de +740.7[1]% depuis son lancement en 2003, le fonds Argonaut a de quoi combler les investisseurs, surtout si l’on compare ce résultat avec celui de l’indice (+514.9%). Pour les gérants du fonds, ces 20 années passées se traduisent également par d’autres statistiques:

  • 240 rapports mensuels. Eh oui, tous les mois, les gérants informent les investisseurs des résultats obtenus et rédigent un rapport sur le mois écoulé. Une revue des 240 rapports produits témoigne également de l’évolution des moyens techniques disponibles pour les réaliser, ainsi que des changements de goûts en matière de graphiques et de couleurs (Ah, les «camemberts» 3D des débuts…)!
  • Depuis 2003, les gérants ont accumulé plus de 12’000 séances avec les entreprises, soit plus de 600 par année. Et jusque récemment, cela signifiait autant de voyages dans les régions les plus reculées, qu’il pleuve ou qu’il vente.
  • En 20 ans, nous avons investi dans 321 sociétés différentes. C’est peu quand on compare à d’autres fonds. Cela montre bien à quel point nous sommes sélectifs et investissons pour le long terme.
  • Nous investissons dans des entreprises et non dans des codes de bourse. Après une analyse minutieuse de leur activité et de leur modèle d’affaires aboutissant à une connaissance approfondie de leur management et de leur marché, nous attendons le bon moment pour commencer à investir. Puis nous augmentons progressivement nos positions, au fur et à mesure que nos convictions se renforcent. Ensuite, il suffit d’attendre que le marché prenne conscience de la valeur de l’entreprise. Cela peut prendre du temps et exige de la patience. La preuve se trouve dans la durée moyenne de détention d’une position qui est de 3.2 ans.

Un investisseur, qui aurait investi EUR 100’000 il y a 20 ans, disposerait aujourd’hui d’un montant bien différent selon le pays (indice boursier) dans lequel il aurait investi. Mais pour avoir un meilleur résultat, il aurait suffi de choisir Argonaut…

2023.06.07.Résultats
Résultat après 20 ans d’un investissement de EUR 100’000 investis en 2003 dans différents marchés européens
Résultats du 30.05.2003 au 26.04.2023

Souvenirs, souvenirs…

Depuis 20 ans, nous en avons accumulé des souvenirs. Des bons, des moins bons et certains franchement étranges !

2023.06.07.scrapbook cover

Nos meilleurs investissements :

  • Hunter Douglas : +180% (2022). Les actionnaires familiaux de ce fabricant de stores et de persiennes ont tenté de racheter les investisseurs minoritaires à bas prix… Mais nous avons résisté et même doublé notre position. L’entreprise a fini par être rachetée par une société de private equity, avec une prime de 173% par rapport à l’offre initiale de la famille.
  • LEM Holdings : +331% (2007). Dans les premiers jours du fonds, nous avons acheté cette entreprise pour la valeur de ses biens immobiliers et de ses liquidités. Et ensuite leur activité a explosé.
  • Chargeurs: +413% (2017). Une ancienne entreprise française (elle a été fondée en 1872) qui, après plusieurs réorientations, a fini par se réinventer totalement. Nous avons pris une participation considérable alors que personne ne croyait au succès de sa transformation.
  • Delclima: +475% (2015). Le fabricant de machines à café De’Longhi s’était séparé de sa filiale de climatisation, mais personne ne semblait vouloir de ses actions. Nous les avons donc achetées et la société a fini par être rachetée avec une forte prime par un acteur japonais.
  • Getaz Romang : +507% (2007). Cette entreprise romande de matériaux de construction détenait des actifs importants ainsi qu’un hôtel à Genève. Elle a finalement été reprise par la société irlandaise CRH.
  • Dialog Semiconductors: +740% (2010). Il s’agit probablement du meilleur investissement de notre histoire (sans compter ceux à venir…). En février 2009, lors d’une de leurs conférences téléphoniques avec les analystes et investisseurs, nous avons réalisé que nous étions les seuls en ligne. C’est à ce moment-là qu’ils ont annoncé qu’ils étaient devenus profitables. À l’époque, la totalité de la capitalisation boursière était couverte par des liquidités. Quelques mois plus tard, ils ont remporté un contrat avec Apple.
  • Volex: +886% (2021). Cet ancien groupe britannique fabriquait des prises pour bouilloires et téléviseurs. Il s’est depuis transformé en un groupe de câblage de haute technologie sous la direction de Nat Rothschild.
  • Biesse : +913% (2017). Nous avons acheté à bas prix ce fabricant italien de machines à tourner le bois après la crise de l’euro. Personne n’avait remarqué que 90% de leur chiffre d’affaires était réalisé hors d’Italie.
  • Danieli : +948% (2007). Une entreprise italienne d’aciéries de classe mondiale mais dont le bilan n’a pas convaincu le marché après le scandale Parmalat en 2003. Il s’est avéré que le marché avait tort et que nous avions bien fait nos devoirs. Aujourd’hui, l’entreprise est toujours aussi performante…

En attendant Godot….

  • NRJ: 15% (2013-2023). Soit une performance annualisée de seulement 1%. C’est bien d’être un investisseur patient, mais parfois, il nous démange aussi d’appuyer sur le bouton «Vendre».

Nos pires investissements :

  • Smoby: -100% (Fraude-2008). Comme on dit, nous nous sommes fait avoir… Il semble que la direction et la famille se soient placé au-dessus des actionnaires et se soient servies elles-mêmes dans la caisse. Malheureusement, cela arrive.
  • Tanfield: -95% (Fraude-2008). Après de mauvaises décisions de gestion, la société a vendu son activité principale à un acheteur douteux doté d’avocats astucieux. L’affaire est toujours en cours, mais l’argent est malheureusement en grande partie perdu…
  • CNIM: -100% (erreurs du CEO, 2022). Cette entreprise était restée aux mains de la même famille depuis 1856, mais tout a dérapé à la 6ème génération. Le responsable du fiasco doit être populaire dans la famille…

Notre meilleure visite d’entreprise :

  • Eichof Breweries (Luzern, CH). «N’hésitez pas à prendre autant de bières que vous pouvez en porter…»

Le meilleur accueil :

  • Heiler Software (Stuttgart, D). Ils nous ont accueillis avec des panneaux « Wilkommen » à la réception et des petits drapeaux suisses dans la salle de réunion. Nous avons appris que, depuis 3 ans, ils n’avaient pas reçu une seule visite d’analystes ou de gérants de fonds…

La pire visite :

  • Rind Flooring (Renningen, D). Nous sommes arrivés, nous avons signé un accord de confidentialité puis avons été informés qu’ils venaient de déposer le bilan.

La visite la plus étrange :

  • Le CEO d’une entreprise italienne, qui restera anonyme, s’est mis à genoux devant nous puis nous a suppliés de lui pardonner.

20 ans de voyages

En tant qu’investisseurs «value», nous considérons que notre métier se fait avant tout sur le terrain plutôt que derrière un ordinateur, dans le confort de notre bureau. Cela se traduit par des voyages à travers toute l’Europe pour aller visiter des entreprises. Concrètement, cela signifie des milliers de kilomètres parcourus en 20 ans, quelque 1’200 billets d’avion et 1’470 tickets de trains.

Avec tous les hôtels que nous avons fréquentés, nous pourrions sans doute écrire un guide de voyage pour nos confrères gérants de fonds ou analystes!

Nos meilleurs hôtels

Le Victoria Hotel Jungfrau et le Grand Hotel Bad Ragaz, dans les deux cas pour des conférences. Et une mention spéciale pour le Duca di Yorke à Milan.

Nos pires hôtels

Sans hésitation, l’IBIS Hotel Luton Airport en 2005 et l’IBIS Hotel Streatham en 2006, tous deux après avoir manqué notre vol… Sinon, le Sheraton Airport Hotel à l’aéroport de Francfort qui, depuis 2018, accueille le très utile Eigenkapitalforum, l’une des plus importantes conférences sur les marchés des capitaux dans le domaine du financement des entreprises en Europe. L’emplacement est efficace mais le lieu est terriblement déprimant !

L’hôtel le plus étrange

Sans conteste, le Shankly Hotel à Liverpool. Deux lits doubles dans la même chambre, des miroirs au plafond et un jacuzzi, mais pas de douche… Ce n’est habituellement pas avec un jacuzzi que nous commençons notre journée…

 

[1] Résultats du 31.05.2003 au 30.04.2023. La performance passée n’est pas une indication des résultats futurs. A moins qu’il ne soit précisé différemment, tous les chiffres indiqués sur ce document se réfèrent au 30.04.2023.