2021 pourrait être un millésime compliqué pour les gérants obligataires. Nos experts expliquent ici comment leur stratégie a, depuis 23 ans, traversé de nombreux environnements de marché difficiles sans jamais enregistrer le moindre défaut.

Par Daniel D. Dolan, Jr, et Roger S. McEniry, membres dirigeants, Dolan McEniry Capital Management, partenaire d’iM Global Partner depuis 2016

 

Daniel D. Dolan Jr

La plupart des gestions obligataires se fondent principalement sur des facteurs macroéconomiques, essayant d’anticiper les taux d’intérêt, ou les rotations sectorielles du marché des obligations d’entreprise. Et certaines gestions s’en sortent plutôt bien ainsi. Quant à nous, notre réflexion ne s’ancre pas sur la macroéconomie. Nous n’ignorons pas la conjoncture et nous suivons de près les évolutions économiques et monétaires, mais nous sommes conscients de n’avoir aucune influence sur elles et, surtout, nous n’avons pas trouvé le moyen de les intégrer de manière efficace à notre processus d’investissement.

Nous préférons nous focaliser sur la qualité du crédit, les flux de trésorerie des émetteurs et le prix à payer pour investir dans les obligations les plus attractives. Que les taux soient élevés ou faibles, les spreads de crédit larges ou serrés, notre travail de sélectionneur obligataire reste le même. Et cette philosophie est restée inchangée au travers des différentes conditions de marché que nous avons traversées depuis la création de la société en 1997.

Suivre notre propre voie

Roger S. McEniry

Il y a une autre variable financière que nous regardons peu : les notations de crédit attribuées aux émetteurs par les agences spécialisées. Nous en avons certes connaissance, sans qu’elles pèsent significativement dans nos décisions. Nous nous positionnons comme des analystes compétents et capables, par notre recherche approfondie, d’acquérir une bien meilleure connaissance du profil de crédit d’un émetteur.

Pour être équitable, en général, les notations des agences sont d’une qualité correcte. Mais dans certains cas, elles s’avèrent exagérément optimistes ou trop négatives. Elles ne font alors qu’aggraver une imperfection de marché déjà existante, offrant ainsi de belles opportunités aux investisseurs menant leur propre réflexion.

Un autre point important est le fait que nos contacts avec les dirigeants des sociétés émettrices de nos obligations sont rares. Les conférences téléphoniques sur les bénéfices et les sessions marathon avec les investisseurs permettent certes de détailler les comptes passés, mais se caractérisent souvent par une communication habile sur la force des résultats du dernier trimestre. Ces informations souvent trop optimistes doivent être filtrées à travers nos propres métriques.

La valeur est dans les flux de trésorerie

Notre processus d’investissement se déroule en deux temps. Le premier s’attache à l’évolution des flux de trésorerie de l’entreprise concernée.

Ce sont en effet les flux de trésorerie qui permettent de financer l’opérationnel, les projets de croissance, les dividendes et, ce qui est crucial pour les détenteurs d’obligations, le paiement des intérêts et le remboursement des emprunts passés. Pour les titres de notre portefeuille, nous recherchons une marge de sécurité confortable entre les cash-flows d’une entreprise et les exigences de son activité.

Les décisions des dirigeants sur l’affectation des flux de trésorerie sont cruciales. Les investissements servent-ils à des projets suffisamment rentables? Le fonds de roulement est-il géré de manière prudente ou sert-il à couvrir les des erreurs tactiques?

Pour pleinement comprendre le profil de nos entreprises émettrices en matière de flux de trésorerie, nous avons choisi d’éviter ou d’avoir une exposition limitée à certains secteurs. Nous préférons des entreprises pour lesquelles nous pouvons sans hésiter comprendre la manière dont sont constitués et reportés les résultats bruts et la marge d’exploitation. Et nous favorisons naturellement les entreprises dont le retour sur investissement est élevé.

Cette approche tend à exclure les sociétés financières, dont les comptes sont trop complexes, mais fait la part belle aux entreprises industrielles, à la distribution, aux valeurs de consommation et aux sociétés technologiques simples, avec des marques fortes et des parts de marché importantes. Une forte croissance des revenus n’est pas un prérequis, tant que les flux de trésorerie d’exploitation dépassent largement les sommes nécessaires au remboursement des intérêts et du principal de la dette.

La deuxième étape de notre processus d’investissement réside dans la sélection des titres du portefeuille. À partir des données financières historiques, nous calculons pour chaque entreprise un ratio de sécurité financière en rapportant les flux de trésorerie ajustés aux charges financières. Nous classons ensuite les obligations selon ce ratio et nous comparons ce classement aux rendements offerts pour établir la liste des titres les plus attrayants sur ces deux mesures. Cette sélection est ensuite analysée quantitativement pour identifier les titres que nous préférons et qui disposent d’une liquidité suffisante. Les fondamentaux des émetteurs en portefeuille sont régulièrement revus pour détecter des signes de détérioration opérationnelle ou de nouveaux éléments inattendus.

Des résultats probants

Notre philosophie implique de limiter le nombre de positions afin de proposer à nos clients des portefeuilles concentrés sur nos meilleures idées. Notre ambition constante est de battre régulièrement les benchmarks. Et, d’après notre expérience, investir dans une quarantaine de positions suffit à offrir une diversification adéquate.

Répartir le risque sur des centaines de titres au seul motif d’assurer une meilleure diversification ferait nécessairement converger le comportement de nos portefeuilles vers celui des indices, alors même que notre objectif est de fournir un profil de rendement différent. En outre, la qualité de notre processus d’investissement souffrirait si nous devions élargir notre recherche interne à un grand nombre de titres ou appuyer nos décisions sur de la recherche externe.

Notre méthode d’investissement a été élaborée avec soin et appliquée avec prudence, avec un objectif bien précis : trouver de la valeur sans jamais perdre d’argent. D’ailleurs, en 23 ans d’existence, nous pouvons en effet nous féliciter de n’avoir souffert d’aucun défaut dans nos portefeuilles d’obligations d’entreprises.

 

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