Vendredi dernier, le marché montait parce qu’on s’attendait à que les « Tarifs Douaniers » ne soient pas si moches que ça. Lundi dernier, le marché montait parce qu’on s’attendait à que les « Tarifs Douaniers » ne soient pas si moches que ça. Ce mardi encore, le marché montait parce qu’on s’attendait à que les « Tarifs Douaniers » ne soient pas si moches que ça. Et hier on s’est repris une claque monumentale, parce que Trump a fait une annonce sur les « Tarifs Douaniers » au sujet des voitures. Et là, on s’est rendu compte qu’en fait ; OUI, ça pourrait être bien plus moche qu’on pensait. Mais pour être franc, on n’en sait rien, l’incertitude est de retour et le MUPPET SHOW, AUSSI !
L’Audio du 27 mars 2025
Télécharger le podcast
Arrêter d’écouter le bruit et acheter des boule quiès !
Je vais être super-cash avec vous : là je crois que l’on frise le « N’IMPORTE QUOI » mais en version « ligue des champions ». On est sur du très très haut niveau et en plus, tous les joueurs sont dans la même équipe. Les intervenants ont totalement perdu la notion de « prendre du recul ». Hier j’étais dans une conférence durant laquelle on essayait d’expliquer aux « jeunes investisseurs » qu’il fallait savoir prendre du recul et « dézoomer » sur l’instantané des marchés afin d’éviter de faire n’importe quoi. Et en fait, hier les marchés ont – encore une fois – fait exactement ce que l’on se tue à essayer d’expliquer aux nouveaux investisseurs. Alors oui, bien sûr, l’incertitude que l’on vit sur les marchés n’est pas agréable, surtout qu’on a le sentiment que Trump est en train de faire des expériences sur nous, histoire de voir comment on va réagir ! Mais quand même des fois, on se demande si l’on ne pourrait pas prendre juste un peu de recul et si réfléchir un peu plus que 12 secondes.
Vous savez, c’est comme si le gars il était assis dans un immense fauteuil posé sur un montagne qui surplombe les marchés boursiers, à côté de lui, il a JD VANCE qui est assis sur un tabouret et Trump lui dit :
– « Tu vois JD, on va leur dire qu’on va monter les tarifs douaniers sur les importations canadiennes, histoire de voir comment ils réagissent, ces cons ! »
Et puis Trump monta les tarifs sur le Canada et le marché plongea en mode panique. Ensuite, dans les 24 heures qui suivirent, le gentil Président remonta sur la montagne, s’assit dans son fauteuil avec son ami Vice-Président à sa botte et il annonça que finalement, il n’allait pas VRAIMENT appliquer ces tarifs et le marché est remonté. Depuis ce temps-là, le gentil Président s’amuse à faire des expériences, histoire de voir comment ces idiots de marchés financiers réagissent. Déjà qu’ils ont mis 6 semaines à admettre que l’application des droits de douanes pourraient avoir un impact sur l’inflation – à la hausse, bien sûr – Trump s’est dit qu’il y avait encore une légion de tests psychologiques auxquels il pourrait s’amuser à soumettre le monde merveilleux de la finance.
Le bruit
Alors avec le temps, on aurait pu éventuellement imaginer que l’on aurait appris quelque chose et que nous aurions commencé à réagir différemment. Peut-être même que nous aurions pu envisager de moins écouter les tergiversations du Président américain qui a pour caractéristique principale, cette étonnante faculté à changer d’avis comme de chemise d’une façon encore plus rapide et efficace que ne le font les marchés financiers depuis 25 ans ! Mais que nenni, nous continuons comme une bande de moutons à écouter attentivement ce que Trump va nous sortir comme connerie pour s’empresser de courir dans la direction qu’il nous a désigné avant de changer d’avis trois jours plus tard en disant que « finalement, les « Tarifs Douaniers » ne seront pas si moches que ça », cette réflexion étant menée sur ABSOLUMENT RIEN DU TOUT, évidemment. On en parlé ces derniers jours, les trois jours de hausse consécutives que nous avons vécu sur les indices étaient principalement drivés par le fait que l’on imaginait qu’éventuellement peut-être que Trump allait être magnanime et qu’il était notre ami et que ça allait bien se passer !
MAIS NON ; PAS DU TOUT, il n’est pas notre ami et hier il est encore remonté sur sa montagne et s’est dit :
– « Tiens, je vais aller les chercher sur les droits de douane pour l’importation des voitures. Je vais être bien agressif en disant bien n’importe quoi et je vais voir comment ces idiots vont réagir !!! »
Et il n’a pas été déçu. Les marchés se sont tous fait déglinguer parce que l’on s’est dit que ; s’il est capable de taxer les voitures importées à hauteur de 25%, autant vous dire qu’il est capable d’absolument tout et n’importe quoi d’ici à l’annonce des tarifs réciproques qui seront annoncés le 2 avril. Depuis hier, le Président en a donc remis une couche et il a rallumé la flamme sous la casserole de l’incertitude. Incertitude que l’on avait presque commencé à oublier. Et puis je vous passe le contenu de son discours, parce que je pense sincèrement qu’un enfant de 8 ans serait capable de démonter son argumentaire.
Irréel
Il est tôt ce matin et cette chronique n’a pas pour vocation de trop rentrer dans les détails sur tout ce qui s’est dit hier soir à Wall Street. Moi, mon job, c’est de vous faire digérer la bouillie immonde de ce qui s’est passé dans le monde de la finance et si possible de vous faire rire sur le chemin du travail. Et c’est pas de tout décortiquer en détail, sinon cette chronique durerait 3 heures et vous seriez obligé de faire des détours sur le chemin pour arriver au bout. Toujours est-il que là, je suis quand même obligé de revenir sur le discours de Donald d’hier soir.
Donc. Pour faire simple, le mec annonce que toutes les voitures ou les pièces détachées de voitures qui seront importées aux USA seront taxées de 25%. Bam ! Ensuite, après avoir fait un gigantesque bras d’honneur de plus aux constructeurs automobiles étrangers, il s’est adressé aux Américains pour leur expliquer que ça allait être « super » parce que toutes les usines de bagnoles qui allaient ouvrir au States pour éviter les tarifs allaient créer des jobs et que tout le monde aurait un travail dans l’automobile.
L’envie et le temps
BON. Déjà il n’a pas demandé aux gens s’ils AVAIENT ENVIE de bosser dans l’automobile, mais en plus on dirait que le mec a déjà anticipé que Renault, Volkswagen, BMW, Mercedes et tutti quanti allaient tous arriver à Détroit la semaine prochaine pour construire des usines et engager des millions de personnes. Il n’a pas imaginé UN SEUL INSTANT que réfléchir au concept de déplacer une partie de sa production aux USA, prend un peu de temps et que même si la décision était prise hier, il y a bien des chances que les usines en question ouvriront APRÈS la fin du mandat de Trump. Sans compter que connaissant la volatilité intellectuelle du Président, la première question qu’un constructeur automobile va se poser, c’est la suivante :
« Combien de temps il va les tenir, ses tarifs, l’autre là-bas ? »
Oui, parce que Trump n’est pas connu pour écrire les choses dans le marbre, lui c’est plutôt le sable et la peinture à l’eau, au premier coup de vent et à la première pluie, c’est retour à la case départ. Bref, hier on a compris que pendant 4 jours on était monté pour rien, en se basant sur des théories fumeuses comme quoi, si ça se trouve, Trump il va la jouer « COOOOOL » avec les droits douane ». Et encore COOOOL avec 4 « O » dedans tellement il allait être sympa avec nous. Et là ce matin, on se regarde tous en se disant : « putain et encore, on ne parle que des voitures »…
Et c’était pas tout
Donc hier les bourses étaient dans le rouge, une fois encore nous avons complètement oublié le concept de l’investissement long terme et encore une fois, nous avons brassé de l’air avec une puissance telle, que si l’on pouvait récupérer l’énergie générée en quelques heures par Wall Street en brassant tellement d’air, que l’on aurait pu fermer toutes les centrales nucléaires du monde tout en ayant assez d’énergie pour alimenter tous les serveurs dédiés à l’IA ces 5 prochaines années. Alors on a beaucoup parlé des voitures, mais il ne faut pas non plus oublier qu’il y a un autre secteur qui s’en est pris plein la gueule à cause du gouvernement et de ses réglementations à la con ; c’est les SEMICONDUCTEURS !
On ne va pas trop s’attarder sur le sujet, mais disons qu’à propos des semiconducteurs on est en train d’appliquer et de comprendre le concept de la phraser qui dit : « C’est la réponse du berger à la bergère ». En gros, tu me colles une baffe sur la joue droite, ne t’attends pas forcément à que je te tende la joue gauche, on n’est pas tous catholiques pratiquants et convaincus !!! Mais pour revenir au sujet des semiconducteurs, vous avez tous entendu que le gouvernement américain a plus ou moins interdits certaines exportations en direction de la Chine pour leur mettre les bâtons dans les roues et leur faire perdre du temps dans la course à l’IA. Dans la foulée, ils ont également blacklisté toute une série de sociétés technologiques chinoises. Alors à ce stade la Chine n’a pas ENCORE répliqué, mais les « intervenants » ont commencé à se dire que le jour où ils répliquent ça ne va pas être une partie de plaisir et qu’en plus, ça pourrait quand même impacter les ventes de sociétés comme Nvidia. Résultat, on a tiré sur tout le secteur sans faire de prisonnier et le SOX a perdu plus de 3% et Nvidia a plongé de presque 6%.
En résumé, d’un côté les « Tarifs Douaniers » font leur grand retour dans le psyché torturé des investisseurs. On s’inquiète des relations commerciales Sino-Américaines qui pourraient rapidement se dégrader et impacter les semiconducteurs et en plus de ça, l’incertitude qui était déjà bien présente dans nos têtes, vient de faire un retour en fanfare, piétinant une confiance que l’on tentait d’apprivoiser à nouveau et qui restait super-fragile quand même et quand on voit l’état de surexcitation dans lequel se trouve Trump, on se dit que le 2 avril c’est quand même super-loin et que l’autre guignol est capable de nous faire à peu près tout et n’importe quoi, surtout qu’en ce moment, notre capacité à la réflexion logique et rationnelle a été remplacée par le cerveau de Kermit la grenouille et Peggy la cochonne. Et moi j’ai l’impression d’être un des deux vieux qui râlent tout le temps dans la loge au-dessus de la scène.
Conclusion
En conclusion, l’incertitude est de retour et géographiquement, nous sommes au même endroit qu’il y a une semaine, tout en sachant que Trump peut partir en cacahuètes d’une seconde à l’autre dans n’importe quel sens. Ce matin en Asie c’est le Nikkei qui cotise le plus avec une baisse de 1% – forcément, sa concentration en tech et en voitures n’aide pas vraiment. En revanche la Chine et Hong Kong ont l’air de se foutre comme de l’an 40 des tribulations de Trump à la Maison Blanche. Le Hang Seng est en hausse de 1.4% et la Chine avance de 0.3%. On a l’impression que là-bas, Trump n’est qu’une série télé et que ça finit toujours bien à la fin, ils ont donc arrêté de l’écouter. Ce que nous sommes incapables de faire. D’ailleurs si vous passez un peu de temps sur X, vous verrez qu’en France – par exemple – on perd plus de temps à parler de Ô combien Trump est taré qu’à se demander pourquoi ils ont toujours un mollusque décérébré à Matignon. Trump est le centre du monde un peu partout dans le monde sauf à Hong Kong et en Chine.
Le pétrole consolide sa position autour des 70$, légèrement en-dessous, l’or est à 3’070$ et le Bitcoin est à 87’500$. Au moins c’est calme de ce côté. Du côté des news du jour, autant vous dire que l’on reste très concentré sur les discours et autres déclarations à l’emporte-pièce du côté de la Maison Blanche et il n’y pas vraiment de place pour autre chose. On notera quand même que selon une source anonyme, Open AI devrait générer 12.7 milliards de revenus cette année, reste à voir si ça justifie une valorisation de près de 260 milliards, valorisation d’ailleurs justifiée par le dernier round de financement mis en place par Softbank. Autrement, Macron a trouvé 2 milliards de plus pour filer à l’Ukraine. Je dois dire que je n’ai aucune idée d’où il sort tout ce pognon, mais s’il avait mis la moitié autant d’effort pour redresser le pays qu’il en met à fonds perdus pour soutenir l’Ukraine, la France serait en train de racheter l’Allemagne et la Silicon Valley en cash.
Les chiffres du jour
Pour le reste, aujourd’hui, il y aura le GDP américain et les Jobless Claims, mais tout le monde attend demain pour les chiffres de l’inflation. Autrement, on parle des tarifs de Trump et le narratif n’est plus DU TOUT LE MÊME que celui de lundi matin. Nous sommes passé de « on s’attendait à que les « Tarifs Douaniers » ne soient pas si moches que ça » à « Oh putain, mais qu’est-ce qu’il va encore nous faire ». Mais qu’on se rassure, connaissant le niveau de rationalité du marché en ce moment, il n’est pas exclu que nous assistions à un nouveau revirement dans les heures à venir. Une chose est certaine, nous sommes en plein Muppet Show financier et même les scénaristes de Netflix n’auraient pas osé inventer des retournements de situations aussi rapides et fréquents. Trump nous a emmené dans une nouvelle dimension…
Pour ceux que ça intéresse et ça n’est pas une blague – la semaine prochaine, le 1er avril – en collaboration avec l’INVESTMENT SOCIETY LAUSANNE et SWISSQUOTE – j’aurais le plaisir de donner une conférence qui a pour thème : « Analyse des marchés financiers et des tendances du moment » autant vous dire qu’il y aura de quoi discuter un moment. Cette conférence aura lieu à l’Amphipole C à l’Université de Lausanne de 17h00 à la fin de l’apéritif.
Le lien pour l’inscription est ici et c’est entrée gratuite, mais mieux vaut s’inscrire.
D’ici-là, passez une très belle journée quand même, moi je vais reprendre mon rôle de vieux rochon du Muppet Show et on se voit demain pour boucler la semaine !
À demain !
Thomas Veillet
Investir.ch
“Someone’s sitting in the shade today because someone planted a tree a long time ago.”
Warren Buffet