La semaine dernière avait commencé par la thématique des taxes douanières. Elle s’était terminée avec la même thématique des taxes douanières – puisque Trump avait plus ou moins laissé entendre qu’il allait annoncer de nouvelles taxes contre à peu près tout le monde. Et figurez-vous que ça n’est pas terminé, puisque cette nuit – juste avant le Superbowl, Trump en a remis une couche pour annoncer qu’il allait taxer de 25% toutes les importations d’acier ou d’aluminium. Depuis l’annonce, les futures sont repartis à la hausse, puisque c’est une bonne nouvelle pour rendre l’Amérique Great Again.
L’Audio du 10 février 2025
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L’axe central
Pour être franc avec vous, on ne sait pas encore qui sera le prochain sur la liste qui va se faire taxer. On a bien quelques idées entre l’Inde et l’Europe, mais une chose est certaine, c’est que l’axe central qui fait vibrer les marchés en ce moment, c’est clairement Donald Trump. D’ailleurs je me demande même s’il a l’occasion de dormir de temps en temps, parce que depuis qu’il est à la tête des USA, on a l’impression qu’il est toujours là, toujours présent et que dès que vous quittez votre écran des yeux pendant plus de 3 minutes ; BAM !!! il est là et il nous sort un nouveau truc. Une fois c’est 500 milliards dans l’IA, une fois c’est la lutte contre le Fentanyl en taxant le Canada et le Mexique, une fois c’est le retour des pailles en plastiques, une fois c’est l’envie de démanteler les éoliennes, de racheter le Groenland. Bref, il n’est jamais à court d’idée et en ce qui concerne les droits de douanes, il a encore une très longue liste de pays à taxer et d’industrie à écraser. Le marché. Nous, les intervenants, nous allons devoir nous habituer, parce qu’il est encore là pour un bon moment.
Et le plus symptomatique dans cette omniprésence de Donald Trump, c’est qu’il prend le pas sur tout. Absolument tout. On peut parler de macro-économie ou de publications trimestrielles, il suffit que Trump nous publie un truc sur X et on passe à autre chose. Tenez, vendredi dernier, il y avait les chiffres de l’emploi américain. Vous serez d’accord avec moi si je vous dis que c’est quand même quelque chose qui nous obsède depuis au mois 24 mois. Si je me rappelle un peu ce qui s’est passé depuis janvier 2023, on est quand même devenus bien obsédés par le fait que l’emploi pourrait ralentir à cause des taux élevés et que – du coup – cela pourrait être éventuellement considéré comme un premier pas vers la récession. Je sais que dans le milieu on a une mémoire de poisson rouge, mais vous reconnaitrez QUAND MÊME que les Non Farm Payrolls, c’est quand même un truc qui est bien présent dans nos agendas le premier vendredi de chaque mois ??? Eh ben depuis que Trump est là, on dirait que c’est passé au second plan. Les chiffres de l’emploi ont également été publié vendredi dernier– c’était même LE CHIFFRE économique le plus important de la semaine. Il faut dire que ces chiffres n’étaient pas non plus très révélateurs, puisqu’en janvier, le nombre d’emplois a augmenté de 143’000, contre 307’000 en décembre et en dessous des attentes qui étaient de 169’000. Mais, EUREKA, BONNE NOUVELLE Le taux de chômage a baissé à 4 %.
On s’en fout !
Il faut donc retenir que dans ces chiffres, on a du bon qui annule le mauvais et qui n’offre aucune indication précise pour l’avenir des taux. En revanche, il est pratiquement certain que les taux ne baisseront pas en mars et que ceux qui y croient encore devraient aller consulter. Mais le problème n’est pas tant le fait que ces chiffres soient bons ou mauvais, le problème c’est que tout le monde s’en foute comme de leur première chemise sur mesure ! Nous sommes totalement hypnotisés par les déclarations et les effets de manche de la Maison Blanche. Cette semaine nous allons avoir les chiffres du CPI américain qui vont être publié et on a l’impression que tout le monde s’en fout, parce qu’il faut s’occuper de ce que dit Trump, Trump et encore Trump.
Bon, en même temps, on ne va pas dire qu’on est surpris qu’il occupe beaucoup de place (pour ne pas dire TOUTE LA PLACE), parce que si l’on se souvient du 20 janvier 2017 au 20 janvier 2021, on a eu droit à des tweets en rafale, des coups de théâtre, et un marché boursier qui a dansé au rythme des annonces de la Maison-Blanche. Une vraie série Netflix. Eh ben vous savez ? On est reparti pour 4 nouvelles saisons ! Je crois d’ailleurs que je vais aller prendre un Xanax et arrêter de m’énerver sur le sujet, parce que nous ne sommes qu’au début de l’histoire. Et pour un peu qu’il arrive à se faire autoriser un nouveau mandat, on n’a pas fini de rire. Toujours est-il que ce matin, on sait que si vous êtes exportateur d’aluminium ou d’acier en direction des USA, vous devez l’avoir mauvaise. Bon, il vous reste encore l’espoir que Trump fasse ça juste pour obtenir quelque chose en échange et que si vous le lui donnez dans les 12 minutes, il sera magnanime avec vous, mais vous devez l’avoir mauvaise quand même.
L’IA toujours l’IA…
Autrement, l’autre sujet de ce début de semaine c’est aussi un sujet avec lequel on nous bassine depuis des mois ; oui, vous l’aurez deviné, c’est l’INTELLIGENCE ARTIFICIELLE. Je sais ça n’est pas très original, mais c’est pas moi qui fait l’actualité ! Et puis il est vrai que lorsque je regarde les nouvelles neuves du monde en général, je dois dire que je suis fasciné de voir combien nous sommes prêts à investir dans l’Intelligence Artificielle alors que l’on ne prend même plus le temps d’investir dans l’intelligence humaine – il n’y a qu’à voir le nombre de cons qui se reproduisent à une vitesse folle en ce moment. Mais ça c’est un autre sujet qui prendrait bien trop de temps à débattre ! Notons quand même que le génialissime Président Macron, le guide français, la lumière de l’intelligence de l’hexagone a tout de même annoncé que la France allait investir 109 milliards dans l’intelligence artificielle, je ne suis pas 100% certain et je n’ai pas les chiffres, mais je ne pense pas que les dépenses dédiées à l’éducation nationale soient du même acabit. Sans parler du fait que l’on peut rester fasciner de voir que la France peut signer des chèques en blanc pour l’IA alors que son déficit crève le plafond et qu’ils ne savent même pas comment ils vont finir le mois.
Toujours est-il qu’en ce moment, le thème de l’investissement dans l’IA est « l’autre centre d’intérêt des marchés ». D’ailleurs à ce propos, je voudrais revenir rapidement sur un sujet assez intéressant et très vite oublié : il y a deux semaines comme aujourd’hui, nous avons entamé un lundi similaire à celui que nous vivons ce matin, sauf que les marchés se sont fait défenestrer parce que l’on avait découvert une nouvelle application qui était numéro UN sur l’Apple Store. Une application qui s’appelait DeepSeek et qui allait nous mettre dans la DeepShit pendant au moins deux jours. Non, parce que le problème DeepSeek n’était pas tant le fait que cette intelligence artificielle-là était plus performante que ChatGPT. Le problème résidait surtout dans le fait que c’était beaucoup, beaucoup, mais alors beaucoup moins cher que ChatGPT, du genre 96% moins cher, mais aussi dans le fait que ça tournait sur des puces obsolètes et que les coûts de développement étaient dérisoires quand on regardait ce que l’on a avait investi dans l’IA en 2024.
Le règne de la terreur
En ce temps-là (il y a 15 jours), nous étions dans le règne de la terreur parce que l’on commençait à se dire que ça n’était pas possible d’avoir cramé autant de fric si ça ne servait à rien. Et puis le narratif a fait son boulot et les Magnificent Seven ont commencé à déclarer qu’ils n’allaient pas changer de stratégie en 2025 – à savoir qu’ils allaient continuer à investir massivement dans le secteur, il y a même quelques boîtes qui ont fait des publications trimestrielles positives et qui en ont profité pour ENCENSER les bénéfices de l’IA – c’est le cas de Palantir – Palantir qui a pris 35% depuis l’annonce de ses chiffres et qui se traite dorénavant à 70 fois son chiffre d’affaires annuel, alors que des sociétés comme Microsoft s’échangent à 15 fois. Et puis en plus des commentaires « encourageants » sur le secteur, lorsque l’on prenait les « promesses des dons » en faveur de l’IA en 2025, il n’y avait pas besoin d’avoir une intelligence artificielle sous la main pour arriver à la conclusion que l’on allait cramer la même somme qu’en 2024, si ce n’est plus !
Et toute cette capacité à imprimer de l’argent pour l’investir dans l’IA est l’autre thème du moment. Tout d’abord on a réussi à effacer le sujet « DeepSeek » des sites d’informations et dorénavant, tout le monde parle des montagnes de fric qui seront investis dans l’IA et Ô combien la richesse du monde sera générée par l’IA dans les années à venir. Enfin, tant que l’IA ne tombe pas sur une redif de Terminator et qu’elle décide de se prendre pour SKYNET. Mais bon, là n’est pas le sujet – pour le moment – mais il faut cependant retenir qu’en ce moment, sur les 7 derniers jours qui viennent de s’écouler, le sujet Trump et le sujet IA sont clairement les deux choses qui se tirent la bourre pour savoir qui des deux va permettre au S&P500 d’atteindre de nouveaux plus hauts historiques.
Pour le reste
Ce matin, un peu à l’image de ce que je viens de vous raconter, les marchés asiatiques sont partagés. Globalement la Chine, Hong Kong et le Japon sont en hausse sur le thème de l’IA et l’Inde est plutôt sous pression sous le thème de droits de douanes. On notera aussi que l’ensemble des minières qui ont un siège à l’est de Washington ne vivent pas le meilleur lundi de leurs vies. Le Japon est en hausse de 0.27%, la Chine progresse de 0.42% et Hong Kong avance de 1.7%. Du côté du Bitcoin on est à 97’000$, le pétrole est à 71.52$ et l’or est au plus haut de tous les temps. Comme d’habitude.
Il n’y pas des tonnes de « nouvelles du jour », si ce n’est que :
– Trump aurait parlé à Poutine, mais Poutine ne confirme pas
– Trump a donné l’ordre d’arrêter de fabriquer des « pennies » qui coûtent plus cher à fabriquer que leur valeur faciale
– Trump a déclaré qu’il pourrait y avoir des irrégularités dans la comptabilité des bons du trésor et que la dette américaine ne serait « peut-être » pas ce qu’elle est
– Trump est allé voir le Superbowl qui a vu la victoire des Eagles de Philadelphie.
– Les derniers sondages montrent que Trump a 53% de taux de satisfaction depuis qu’il est arrivé – en gros, ses électeurs ne l’ont pas encore lâché
Et puis, pour conclure, je pourrais vous parler du Superbowl Indicator qui dit que si une équipe de la National Football Conference (NFC) gagne, les indices iront plus haut en 2025. En revanche si c’est une équipe de l’American Football Conference (AFC) qui l’emporte, c’est la fête aux bearishs. Et ce truc a « fonctionné » tellement souvent qu’il en devient presque crédible… jusqu’à ce qu’il ne le soit plus du tout, bien sûr. Oui parce qu’entre 1967 et 2017, le Superbowl Indicator a eu environ 80% de taux de « réussite ». Mais depuis 2017, c’est la catastrophe et ça ne fonctionne plus du tout. Alors je pourrais vous en parler, mais je ne le ferais pas. Même si les Philadephia Eagles sont de la National Football Conference et qu’en théorie c’est bullish et qu’en théorie, tout va bien se passer.
Côté chiffres
Pour ce qui est des chiffres économiques, il n’y aura rien aujourd’hui. Sauf Madame Lagarde qui parlera. Mais comme elle parle bientôt un jour sur deux, tout le monde s’en fout. Par contre demain il y a Powell qui va témoigner devant les élus américains et qui remettra ça mercredi pour ceux qui n’ont pas écouté. Et puis mercredi, il y aura les chiffres de l’inflation américaine, les premiers depuis l’ère Trump 2.0.
Côté trimestriels, ça continue encore et encore aujourd’hui nous aurons McDo, On Semi’s et la Banque Cantonale de Glaris. D’ici-là, il me reste à vous souhaiter une excellente journée et un très bon début de semaine. On se voit demain, comme d’habitude !
Thomas Veillet
Investir.ch
“The most difficult thing is the decision to act; the rest is merely tenacity.” – Amelia Earhart