La moindre des choses que l’on puisse dire, c’est que les chiffres de l’emploi ont de sacrées ondes de choc. Nous voici 4 jours après les publications des chiffres de l’emploi américain et tout le monde parle encore de ça. Enfin, parle de ça, c’est vite dit. Disons que l’on parle surtout des conséquences de ces chiffres. Non, parce qu’à la basse, créer des jobs, c’est plutôt bien pour l’économie. Mais en l’occurrence, si l’économie est trop forte, ça cause de l’inflation et si y a de l’inflation, la FED ne peut plus baisser les taux et comme nous sommes toxicodépendants à la baisse des taux, forcément les « bons » chiffres de l’emploi nous donnent des gaz.
L’Audio du 14 janvier 2025
Inflation (encore)
Alors oui, il faut l’avouer, le sujet de cette chronique c’est encore une fois l’inflation. Mais je dois vous avouer que j’en ai tellement MARRE de parler du sujet de l’inflation et même d’écrire ou de prononcer le mot INFLATION, que j’essaie d’aborder le sujet par toutes le circonvolutions possibles et imaginables pour essayer de garder le lecteur captif et ne pas qu’il s’endorme avant la fin du quatrième paragraphe. Pourtant, j’ai beau chercher et même en utilisant un dictionnaire des synonymes, il n’y pas d’autre alternative. L’inflation est parmi nous et la crainte du moment, c’est que visiblement, elle est faite pour durer. C’est en tous les cas le sentiment que ça donne.
Il y a encore quelques jours on parlait de « plusieurs » baisses des taux en 2025 et après les chiffres de l’emploi et le taux de chômage à 4.1%, on parle de plus en plus « d’accepter le fait que les taux ne BAISSERONT PAS en 2025 ». En tous les cas aux USA. Même si la plupart des experts en finance tablent encore sur 2 baisses dans la seconde partie de l’année, on sent bien que le cœur n’y est plus et que les interrogations deviennent de plus en plus nombreuses. Hier la BCE a tout de même déclaré que de leur côté, ils allaient quand même rester conciliant en baissant encore les taux cette année, mais en Europe c’est pas pareil, s’ils ne baissent plus les taux, l’économie des grands pays de la zone euro va entrer en récession (peut-être même que c’est déjà fait d’ailleurs).
Mauvaise journée avec un mais
Du coup, la séance d’hier aura été de couleur rouge. Mais avec une lueur d’espoir à la fin de la séance américaine. Un bon petit reversal dont ils ont le secret quand les Européens sont rentrés à la maison. Mais nous avons donc tous commencé la journée en se prenant la tête entre les mains et en hurlant « Oh mon Dieu la récession est parmi nous DE NOUVEAU et on est très très mal ». Un peu dans le sillage de New York vendredi soir. L’Asie est partie dans le rouge à cause de « l’inflation américaine qui va repartir et la FED qui ne va plus JAMAIS baisser les taux ». Puis, dans la foulée, l’Europe a fait de même, le tout, jusqu’à la clôture des marchés du Vieux Continent.
Aux USA on a fait de même et on a même tiré le S&P500 jusqu’au niveau où il était ce fameux jour de novembre 2024 où l’on croyait ENCORE que Kamala Harris pouvait être élue à la succession de Joe Biden. Oui, le S&P500 est retourné chercher les bas du mois de novembre, là où il se trouvait lorsque la musique de YMCA a commencé à retentir et que Trump est monté sur scène pour sauver les USA, rendre l’Amérique Great Again, stopper les guerres et mettre des Robotaxis partout dans les rues. Souvenez-vous combien le marché avait été euphorique et explosif à cette époque où le Bitcoin ne faisait que monter et où Elon Musk ne pesait que 250 milliards de dollars. Eh ben hier soir nous sommes revenus EXACTEMENT à ces niveaux. Enfin, presque. À une semaine de l’investiture de Trump, le marché est revenu au niveau de « l’ELECTION DAY ». Alors je ne sais pas si c’est à cause de ça qu’il a commencé à rebondir, mais on dira que ça y ressemble pas mal.
Reversal
Oui, parce que même si les indices européens ont terminé dans le rouge hier, les USA nous ont fait un retournement de marché aux petits oignons, ça faisait plusieurs mois qu’on n’avait plus été aussi dynamique dans un renversement de tendance intraday. Depuis le 11 septembre pour être précis. Le 11 septembre 2024, pas le 11 septembre, 11 septembre, on est bien d’accord. Donc, il y a 4 mois, le S&P500 avait ouvert en baisse de 1.6% pour terminer en hausse de 1%. Hier soir nous avons baissé de 0.9% avant de remonter pour terminer en hausse de presque 0.2%. Alors oui, j’avoue ça n’a pas non plus l’air complètement délirant, mais il était tout de même assez impressionnant de voir que dès que l’on a atteint les 5’770 sur l’indice, la volatilité s’est effondrée et le marché est remonté. Comme si la boucle était bouclée et comme si le « risque d’inflation » avait été définitivement intégré dans la tête des investisseurs.
Dans les heures qui suivirent, c’est comme si le sujet avait été mis de côté et comme si nous étions en train de passer à autre chose. Je sais que mes écrits de ce matin ont l’air très ésotériques, mais si je regarde la chronologie des faits, c’est assez impressionnant ; en début de journée on parle de rendement du 10 ans qui est trop haut, de fin de la baisse des taux et du retour d’une inflation qui ne veut pas rendre les armes et en fin de séance on nous parle d’anticipation de la saison des résultats qui commence mercredi et de l’investiture de Trump. C’était vraiment comme si cette problématique taux/inflation méritait 2.5% de baisse et qu’une fois que cela a été fait : BAM ! On peut racheter parce que si les sociétés font mieux que prévu, ça va cartonner. Alors oui, l’inflation va repartir à la hausse et non, la FED ne baissera plus les taux et va peut-être même les monter, mais on s’en fout parce qu’en allant chercher les 5’770, on s’est affranchit de la thématique de la baisse des taux et dorénavant on ne va s’accrocher qu’aux bons chiffres trimestriels à venir.
Bipolaire
Par moment, j’ai le sentiment que ce marché est bipolaire et que si on lui file le bon traitement, la vie serait plus simple. Toujours est-il que la thématique de l’inflation (désolé d’avoir utilisé ce mot pour 13ème fois depuis le début de la chronique) mais toujours est-il que la thématique de l’inflation (14ème) n’est pas terminée puisqu’aujourd’hui il y aura tout de même le PPI américain pour chauffer la place avant le CPI et le CORE CPI de demain. Mais même si le CPI est plus fort que prévu, j’ai presque l’impression que l’on a déjà admis que l’inflation n’est pas prête à aller au 2% prévu et que les taux ne baisseront plus. Là nous sommes passé en mode guerrier et on attend plus que des bons chiffres trimestriels – histoire de voir que l’économie US est great again, le tout saupoudré par l’arrivée du Messie le 20 janvier.
Et d’ailleurs, il sera de bon de le voir arriver aux commandes, parce que depuis quelques jours, Joe Biden se précipite pour faire tout et n’importe quoi avant de se faire jeter dehors de la Maison Blanche ! C’est impressionnant, à chaque jour qui passe, Biden arrive avec des nouvelles décisions. Des trucs qu’il aurait pu faire durant ces 4 dernières années, mais qui deviennent urgentes au crépuscule de son mandat. Hier il est encore revenu sur ses restrictions d’exportation de matériel lié à l’IA, empêchant des boîtes comme Nvidia de faire ce qu’ils veulent. Nvidia a d’ailleurs exprimé son mécontentement sur son site faisant DÉJÀ appel à Trump pour être un peu plus « censé ». Le mot « censé » n’est pas celui que j’aurais utilisé pour Donald Trump, mais quand on voit l’état de décrépitude de Biden qui fait tout et n’importe quoi à une semaine de faire ses bagages, on peut se demander si quelqu’un ne pourrait pas le museler avant qu’il envoie des F-117 bombarder le Kremlin avant ce week-end.
En Asie et chez Abercrombie
En conclusion, la journée a commencé avec l’inflation, l’emploi, la non baisse des taux et se terminait avec l’envie de croire que les sociétés vont publier des bons chiffres et c’est d’ailleurs le cas, puisque qu’Abercrombie a publié des prévisions intéressantes et s’attendait à ce que les ventes du quatrième trimestre augmentent de 7 % à 8 % par rapport à l’année dernière, ce qui est supérieur aux prévisions précédentes qui tablaient sur une augmentation de 5 % à 7 % et surtout en ligne avec les attentes. De très belles prévisions, on ne peut pas le nier. Le titre a quand même perdu 16% sur la nouvelle. Alors oui, dans la foulée Macy’s a également annoncé que les ventes sur la période Noël n’avaient pas été aussi bonnes que ça. Dans le doute, Macy’s a perdu 8% et Abercrombie s’est fait allumer sans que l’on comprenne vraiment pourquoi… Visiblement, durant le trimestre à venir, si vous battez les attentes, il va ne pas falloir le faire à moitié, sinon la sanction sera terrible.
Ce matin, on a deux salles et deux ambiances en Asie. D’un côté le Japon qui revient de vacances et qui rattrape le retard en baissant de 2% et la Chine et Hong Kong qui sont en pleine bourre parce que les membres de la nouvelle équipe économique du président Trump envisageraient d’augmenter progressivement les droits de douane chaque mois, selon un article de Bloomberg qui date de ce matin. Shanghai progresse de 2% et Hong Kong de 1.6%. Le pétrole est toujours relativement fort et se traite à 77$, toujours la thématique des sanctions contre les Russes, mais cependant, depuis quelques heures, on voit quelques vendeurs qui commencent à se dire que Trump ne va pas laisser faire… Du côté de l’or on est toujours autour des 2’680$ et le Bitcoin nous a également fait un reversal de folie. Alors que tout le monde commençait s’inquiéter de le voir casser les 90’000$ à la baisse – il a même fait un plus bas à 89’164$ – le voilà qui est reparti comme une balle et qui se traite à 95’000$ ce matin. Au passage, on notera que Microstrategy a recommencé à acheter du Bitcoin à la pelle.
Les trucs à savoir
Dans les choses à retenir, il faudra donc noter que Johnson & Johnson a confirmé le rachat d’Intra-Cellular Therapies pour 132$ par action. La chose était déjà dans les journaux hier matin, mais c’est dorénavant confirmé. Il y a aussi Moderna qui s’est faite démolir de 17% après avoir coupé ses attentes de revenus de près de 1 milliard de dollars pour l’année, nettement en-dessous des attentes des analystes. Sage Therapeutics bondissait de 34% après avoir annoncé que Biogen rachetait le reste des actions qu’ils ne détenaient pas encore. Le prix final devrait être autour des 7.22$ alors que le titre se traitait à 5.60$ vendredi dernier. Dans le secteur du Quantum Computing, le bain de sang continue. Hier soir le patron de Meta, Mark Zuckerberg – qui a déclaré ne pas être un spécialiste – a tout de même exprimé ses doutes sur l’avenir du secteur. L’ensemble des titres du groupe se sont à nouveau fait défoncer. D-Wave Quantum a perdu 34% et Rigetti plongeait de 32%. La sanction est terrible, puisque sur quatre séances, la correction est de 65%.
Autrement, alors que l’on parle de bannir Tik Tok des USA, on parle aussi que Musk pourrait racheter les opérations américaines du média chinois. Et pendant ce temps tous les politiciens français menacent de quitter X parce que Trump fait de l’ingérence. Ce qui est super marrant c’est que les politiciens français qui sont tous – sans exception – des menteurs patentés et des manipulateurs professionnels sont tous en train de hurler à la mort parce que X leur fait de la concurrence. Mais qu’ils se cassent. Sauf qu’ils osent pas, c’est un peu comme les gens qui disent sur Facebook que ça ne sert à rien et qu’ils vont partir juste pour qu’on vienne leur dire : NON, ne part pas !!! On t’aime ! Toujours à propos de la France, aujourd’hui le clown qui leur sert de Premier Ministre devrait faire son discours de politique générale et nous pourrons ainsi voir s’il va lécher suffisamment les pieds de la gauche et de la droite pour espérer rester plus de trois semaines à Matignon et offrir un peu de stabilité au pays. Et puis, on va terminer sur une bonne nouvelle, puisque la bulle de l’Intelligence artificielle devrait durer encore deux ans avant d’imploser, c’est ce qu’affirme Gene Munster, analyste et gérant chez Deepwater Asset Management.
Chiffres du jour
Côté chiffres du jour, nous aurons le PPI en Suisse, le ZEW en Allemagne et en Europe et puis cette après-midi, ça sera le PPI américain, histoire de ramener encore une fois le thème de « l’inflation » sur le plateau. Pour le moment c’est le rebond qui continue sur les futures américains qui sont en hausse de 0.34% et comme l’Europe a raté le reversal d’hier, ça devrait tout ouvrir dans le vert ce matin !
Passez une excellente journée et nous on se revoit demain matin à la même heure et au même endroit pour parler CPI et Inflation tous azimuts. Sortez couverts, il fait froid et à demain !
Thomas Veillet
Investir.ch
« La France, comme elle est, c’est pas plus mal que si c’était pire. »
Coluche