Il y a des matins plus compliqués que d’autres. Des matins où t’as l’impression que tu vas te répéter encore et encore et que la séance d’hier ne donne pas l’impression d’apporter beaucoup d’eau au moulin de ta chronique du jour. Trump n’a pas nommé de nouvelle star de la télé à la tête d’un ministère quelconque, les chiffres économiques qui sortent nous montrent que c’est quand même pas aussi facile qu’un film hollywoodien et politiquement, c’est le merdier en France et en Corée du Sud. Mais pendant ce temps, l’Allemagne bat des records sans se poser la moindre question. Pourtant, de l’autre côté, l’optimisme des investisseurs en action reste définitivement indéboulonnable.

L’Audio du 4 décembre 2024

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Reste l’attente

On ne va pas se mentir, nous restons dans l’attentisme le plus total. Nous sommes comme coincés au milieu de nulle part. D’un côté les bulls sont plus bulls que jamais et Citi expliquait d’ailleurs dans un récent rapport que les « Bears » avaient définitivement jeté l’éponge (en tous cas pour l’instant) et de l’autre on a quand même l’impression qu’il y aurait de quoi s’inquiéter économiquement parlant. Je ne vais pas revenir sur l’avalanche de données économiques qui concernent la dette ou l’emploi qui laissent à penser que ça ne peut pas durer comme ça, mais pour le moment, on n’arrive pas à reprendre une vie normale tant que Trump n’est pas installé dans le bureau ovale.

En effet, le marché, les « gens », les investisseurs attendent tellement de ce que Trump va mettre en place fin janvier qu’il paraît totalement illogique de vouloir shorter le marché alors que « si ça se trouve, ses mesures vont tout régler en trois semaines ». Que ça soit les taux, l’inflation, les impôts, l’emploi ou les cryptomonnaies, on se dit que les Super-Pouvoirs de Trump pourraient largement nous surprendre. Ce qui empêche les gens de vendre, parce qu’ils ont trop peur de rater les 25 prochains pourcents. Du coup, le marché reste bloqué dans une espèce de torpeur hivernale qui attend un miracle, mais qui est incapable d’agir fondamentalement tant que Trump n’a pas mis la main sur la bible pour accepter le job de Président des Etats-Unis.

Les JOLTS

Alors oui. Oui bien sûr, hier il y a eu la publication des JOLTS – ce fameux chiffre qui était le préféré de Madame Yellen lorsqu’elle était à la tête de la FED – ce fameux chiffre qui regroupe le nombre d’offres d’emplois qui sont publiées aux USA depuis 30 jours. Cela tient compte des offres qui sont là depuis 6 mois, comme celle qui viennent de tomber. Ce chiffre nous permet d’avoir un ordre d’idée, histoire de voir s’il y a vraiment du travail aux USA et si les entreprises cherchent VRAIMENT du monde. Et hier la surprise était plutôt pas mal puisque les JOLTS ont progressé à 7,744 millions d’offres en octobre, contre 7,372 millions en septembre. Bon. Les esprits chagrins dont je fais parties signaleront au passage que c’est encore une fois un chiffre qui est tiré au sort par l’équipe de bras cassés du Bureau of Labor Statistiques qui se goure en moyennes 9 fois sur 12 et que donc ; ça vaut ce que ça vaut, mais ça vaut surtout la peine de ne rien faire en prenant plutôt le temps d’attendre les chiffres des Non Farm Payrolls qui sortiront vendredi et qui seront tout aussi bidouillés, mais HEY, c’est les NFP !!! Alors on ne va pas rigoler et on va les observer sérieusement et religieusement (même si ça fait plus d’un an qu’ils sont de toutes façons recorrigés le mois suivant et le mois suivant qui suit le mois suivant).

Pour faire simple, hier on a attendu. On a quand même pris le temps d’aller gratter dans les JOLTS pour se rendre compte QUAND MÊME que les NOUVELLES OFFRES d’emplois – celles qu’il faut séparer des anciennes qui traînent dans le système depuis trop longtemps, comprenez que si vous trouvez une offre d’emploi pour devenir le « scribe de Jules César » ou être « l’assistant personnel de Joe Biden pour lui lire son prompteur », vous comprendrez bien que ces annonces ne sont plus très crédibles – en revanche on peut se concentrer sur celles qui sont sorties depuis le début du mois de novembre. Comme par exemple : auditeur chez Super Micro. Bon, celle-là elle compte pas, puisque le poste a été attribué. Bref, tout ça pour vous dire que les NOUVELLES OFFRES sont au plus bas depuis 4 ans. En résumé, il y a plus d’offres d’emploi mais pas tant de nouvelles que ça. Le marché a donc immédiatement réagi avec clairvoyance, logique et anticipation en estimant que la « relative force des JOLTS devrait permettre à la FED de baisser les taux comme prévu en décembre ». Il faut donc comprendre – à demi-mot – que « la mauvaise nouvelle, on s’en fout » et que la bonne… Ben elle est quand même vachement bonne.

Record, record et mort aux Bearishs

Tout ça pour vous dire que le S&P500 a battu un nouveau record, qu’Apple, Meta, le Nasdaq Composite et le Nasdaq 100 ont fait pareil et terminent tous au plus haut de tous les temps. Le SOX va « un peu mieux » mais on a connu mieux, Nvidia traîne la patte et c’est un peu le cas dans tout le secteur des semiconducteurs. Par contre, l’Allemagne est toujours au mieux de sa forme. Enfin, je devrais plutôt dire : le DAX est au mieux de sa forme. L’UBS a downgradé Mercedes, Volkswagen est dans le pâté et hésite à ressortir une coccinelle basée sur le modèle de celui des années 40 et la confiance du consommateur est en train de passer en terrain négatif et que SAP termine encore une fois au plus haut de tous les temps avec une hausse affichée de 190% sur 2 ans, permettant ainsi au DAX de faire de même. Le DAX qui terminait hier pour la première fois de son histoire au-dessus des 20’000. Je ne vais même plus commenter la chose, surtout qu’il n’y a plus rien de rationnel là-dedans.

Et puis, pour une fois dans l’histoire des marchés boursiers, les traders américains ont quand même pris le temps de jeter un œil sur ce qui se passe en France. Pour être franc avec vous, je pense qu’ils n’ont pas tout compris ce qu’il se passe à l’Assemblée Nationale – et ça tombe bien, parce que je crois que c’est à peu près pareil en France. La seule chose que les Français sont en train de comprendre c’est que peu importe que les politiciens soient de droite, de gauche, du centre, à voile ou à vapeur, fan de Karl Marx ou passionnés du Général De Gaulle, c’est tous des clowns qui pensent surtout à eux-mêmes et à comment ils vont se placer sur l’échiquier politique de 2027 pour essayer de devenir Kalife à la place du Kalife. On disait récemment que les élections aux USA, c’était avoir le choix entre la peste et le choléra et que si une chèvre s’était présentée, elle aurait probablement gagné l’élection. Mais en France c’est devenu carrément un autre niveau parce que si la chèvre en question avait les faveurs du peuple français, la gauche, la droite et le milieu se seraient associés pour en faire du méchoui et essayer en plus d’expliquer que la chèvre s’est suicidée parce que c’était à cause d’elle que de déficit s’est creusé ces 7 dernières années.

Bref, c’est le Muppet Show au Palais Bourbon et dès ce soir, ça sera pire puisque l’on va assister à la chute du gouvernement Barnier en direct – à moins d’un miracle. Et le monde de la finance observe ça sans trop savoir quoi en faire. Même le CAC40 n’a plus la force de baisser. Et pendant ce temps, le Roi de France est en représentation chez MBS pour prendre des cours sur : « comment se débarrasser des opposants qui dérangent » et il en profite pour vociférer dans un micro et dire que JAMAIS IL NE DÉMISSIONNERA et que, « by the way », il a encore trouvé trois milliards pour donner à l’Ukraine. Non seulement le gars a une opinion de lui-même au-dessus de ce que l’on peut imaginer, mais EN PLUS, s’il arrêtait simplement de faire des virements à Zelensky, il aurait réglé le problème des retraites depuis longtemps. Tu m‘étonnes que des Français soient en train de construire des guillotines dans leurs garages. Bon, je m’emballe. Mais en conclusion le CAC n’a pas baissé et on n’est même pas sûr qu’il va le faire si la tête de Barnier finit dans un panier ce soir.

En Asie

Ce matin pour une fois, on ne parle pas trop du Japon – qui d’ailleurs ne fait rien – ni de la Chine et de Hong Kong – qui sont péniblement en hausse. Mais on parle surtout de la Corée du Sud et de son Président qui ne sait plus trop s’il veut être sous la loi martiale ou pas. Alors pour être franc, comme je lis très mal le coréen, je n’ai pas tout compris ce qui se passe, mais pour faire simple, c’est un tel bordel politique que le Président a décidé de mettre le pays sous la loi martiale avant de tourner la veste quelques heures plus tard. Je savais même pas que c’était possible. Mais si on regarde ce qui se passe au parlement Sud-Coréen en ce moment, on dirait la France de là-bas. J’espère que Macron n’a pas entendu l’histoire de la loi martiale, sinon ce soir Paris est sous couvre-feu. Du côté finance, le KOSPI est en baisse de 1.45% – ça sent pas la panique non-plus. Enfin, tant que Kim Yong Un Dos Tres ne pète pas un plomb.

Pendant ce temps, entre tensions géopolitiques et production pétrolière saoudienne qui risque de ne pas reprendre à plein régime tout de suite, le baril est remonté à 70$ et traite toujours dans son « range » 66.70$ à 72.75$. Le Bitcoin et l’or jouent à un-deux-trois soleil et le premier qui bougera aura perdu.

Les nouvelles neuves

Pour ce qui est des nouvelles du jour, en dehors du fait que tout le monde « attend les chiffres de vendredi », on retiendra quand même qu’hier soir after close SalesForce a publié ses chiffres trimestriels et pour faire simple : ils ont battu les attentes et augmenté leur guidance, le titre bondissait de 9% dans les échanges tardifs après 22h. le titre devrait ouvrir ce soir au-dessus des 360$ – ce qui constituerait un nouveau record d’altitude historique pour le titre et un rebond de 70% depuis les chiffres « merdiques » du mois de mai dernier. On notera aussi que le Barron’s s’interroge sur « ce qui se passe à l’interne chez Super-Micro » – ça fait plaisir de ne pas être le seul. Le titre était en baisse de près de 5% hier et reperdait 2% after close. Il y a aussi des rumeurs de Take-Over qui circulent sur Worldline – le spécialiste des paiements français. L’action va dans tous les sens en ce moment.

En Suisse, l’inflation a rebondi pour la première fois depuis ce printemps. Les prix à la consommation ont renchéri de 0,7% sur un an, contre 0,6% en octobre. Comparé au mois précédent, ils ont reculé de 0,1%. C’est excitant, non ? Pendant ce temps, toujours en Suisse, le bilan du Black Friday est considéré comme « mitigé ». Tu m’étonnes, on commence à comprendre qu’on se fait avoir à chaque fois. Et puis, à propos de se faire avoir ; on peut revenir brièvement sur la dette US. La dette des États-Unis a augmenté d’environ 13’000 milliards de dollars depuis 2020 et atteint le niveau record de 36’000 milliards de dollars. Ça on le savait. Mais ce qui est intéressant, c’est le calcul des intérêts : Dorénavant, on sait que le gouvernement US devrait dépenser 3.8 milliards de dollars par JOUR, juste pour payer les intérêts débiteurs de la dette et, seulement pour 2025. La grande question que l’on peut se poser c’est : « Mais pour quelle raison les dépenses du gouvernement américain atteignent-elles des niveaux pareils si nous sommes sur la voie d’un « SOFT LANDING ». Alors je sais bien que c’est pas le moment de s’en inquiéter pour le moment, puisque le Messie va tout régler dans 8 semaines, mais disons que 3.8 milliards par jour, ça fait quand même une cinquantaine de Jet Privé Gulfstream G800 ou environ 4’000 Ferrari SF90 Stradale (dépendant des options), par JOUR ! Même le dernier Yacht de Jeff Bezos ne valait « que » 500 millions. Je ne sais pas ce que Trump va faire comme magie, mais j’espère qu’il est passé par Poudlard.

Source : Visualcapitalist.com 

Les chiffres du jour

Pour ce qui est des chiffres du jour, nous attendrons les chiffres ADP de l’emploi et l’ISM non-manufacturier, mais il y aura surtout Madame Lagarde qui va parler, sachant qu’un de ses sbires a déclaré que la BCE allait baisser les taux de 25 basis point lors du prochain meeting, mais que ça risque bien de s’arrêter là. Et puis pour boucler la journée, il y aura aussi Monsieur Powell qui va parler et ça, ça pourrait être sympa.

Pour le moment, les futures sont en hausse de 0.15% et comme disait le mec qui tombait du 125ème étage en passant devant le cinquantième étage : « jusque-là, tout va bien ». Passez une excellente journée et on se voit demain pour de nouvelles aventures et pour attendre vendredi encore un peu plus !

À demain !!!

Thomas Veillet
Investir.ch

“It’s how you deal with failure that determines how you achieve success.”
–David Feherty