La séance de ce mardi était censée se concentrer sur les publications trimestrielles des bancaires, puisque Goldman, Citi et Bank of America, ainsi que Charles Schwab étaient censés dévoiler leur trimestre. Ce qu’ils ont fait. Sauf qu’entre deux Biden et son équipe ont décidé de lancer une réflexion pour limiter les exportations de semiconducteurs liés à l’IA à destination de l’étranger, histoire de ne pas avoir trop de concurrence sur le sujet. Le secteur n’a pas aimé du tout. Le SOX qui était à deux doigts de ses plus hauts historiques a fait un grand pas en arrière. Sans compter qu’ASML s’est planté dans la publication de ses chiffres et que l’énergie s’effondre encore un peu plus.

L’Audio du 16 octobre 2024

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Pas un mot sur la macro

Au milieu de cette avalanche de nouvelles qui concerne les sociétés – ce que l’on appelle « la saison des résultats » – on n’a pas trouvé le temps de parler macro-économie. J’en parlais encore hier ; la macro est passé au second plan et nous sommes en train de nous concentrer sur les annonces trimestrielles des sociétés, et les annonces sur les sociétés tout court. Alors si vous êtes prêts, on va attaquer dans l’ordre.

Commençons tout d’abord par les semiconducteurs : les clowns de la Maison Blanche ont donc décidé de faire parler d’eux, sachant que c’est peut-être une des dernières fois puisque Trump a l’air de prendre de l’avance, même si le titre de sa société s’est fait démonter hier. Trump Medias perdait 20% et était stoppée à la baisse à un certain moment de la journée, même s’il n’y avait aucune nouvelle. Mais là n’est pas le sujet, Biden et ses sbires sont donc en train de réfléchir à limiter l’exportation des puces IA à destination de certains pays afin que les pays en question ne prennent pas trop d’avance sur la suprématie américaine sur l’intelligence artificielle.

Bain de sang

Le résultat ne s’est pas fait attendre. Nvidia a plongé de 4.7% après avoir touché son plus haut historique, AMD perdait 5%, ARM plus de 6%, AMAT plongeait de 11%, tout comme KLA Tencor qui reculait de 14% et des poussières. Et la liste est longue. Ce qu’il faut surtout retenir c’est que le SOX s’est pris plus de 5% dans les dents et que le secteur à la mode a été remis en question toute la soirée, même si rien n’a été décidé encore.

Et puis, au milieu de la bronca déclenchée par l’administration Biden, il y a ASML qui a trouvé le moyen de faire parler d’eux, mais encore mieux que les autres. La société hollandaise qui devait publier ses chiffres ce matin s’est gourée en publiant ses chiffres sur son site dans l’après-midi hier. La publication a été brève et retirée rapidement, mais le mal était fait. Sans compter que les chiffres étaient en-dessous des attentes.

ASML a donc décidé d’arracher complètement le sparadrap et de tout balancer. Grosso modo, les chiffres sont inférieurs aux attentes et les prévisions des ventes pour 2025 sont revues à la baisse. Et c’est ça qui n’a pas plu. Le titre s’est fait démonter et clôturait en baisse de 16%. Pourtant toute la communauté des analystes a pris leur défense expliquant que c’était plus une surcapacité des usines qu’un ralentissement des ventes et que, sur le long terme ; tout allait bien se passer. Le marché ne l’a pas entendu de cette oreille et il faudra peut-être lui expliquer un peu plus longtemps. Mais notons tout de même une chose dans la publication d’hier : ASML a déclaré que le seul secteur qui se portait bien restait quand même celui de l’IA. Même si personne ne les a écoutés, parce qu’ils étaient trop occupés à vendre Nvidia, la nouvelle pourrait faire écho dans les jours à venir avec les « autres » publications un peu plus spécialisées sur l’intelligence artificielle. On s’accroche à ce que l’on peut pour ne pas chuter complètement.

Les bancaires mises de côté et les pétrolières dans le sillage du pétrole

Du côté des chiffres attendus, il y avait également le secteur bancaire. L’un dans l’autre, ce qu’il faut retenir, c’est que ça ne se passe pas trop mal et que c’est surtout le côté « banque d’affaire » qui se passe bien. Hier Goldman et Bank of America n’ont rien fait en termes de performances, mais on va dire qu’ils avaient largement profité des annonce de JP Morgan & Co la semaine dernière et que finalement, c’était attendu. Citi a tout de même annoncé une baisse de 9% de son bénéfice, ce qui lui a coûté sur la séance. Et puis, dans le secteur on retiendra surtout Charles Schwab qui a fait mieux que les attentes, augmenté sa guidance et réduit sa dette. Les analystes se sont regardés entre eux et se sont dit qu’il se passait quelque chose chez Schwab, le titre prenait 6% durant la séance et on peut s’attendre à des upgrades dans les jours à venir, on dirait.

Si les financières étaient un peu mises à l’écart à cause de la samba provoquée par ASML et Biden dans le secteur des semiconducteurs, il fallait aussi noter que les vendeurs étaient tous de sortie sur les pétrolières. L’ETF sectoriel reculait de plus de 3% alors que la « déception » d’entendre qu’Israël ne frapperait pas les raffineries pétrolières en Iran se ressentait très fort sur le prix du baril. Nous vivons une époque qui est quand même formidable, puisque nous sommes arrivés à un stade où MÊME durant les guerres, les états-majors militaires dévoilent leurs stratégies en avance pour ne pas perturber les fluctuations boursières et le trading des matières premières. Reste à qu’Israël tienne ses promesses. Pour le moment, on a l’impression que l’état hébreu conserve sa carte « droit de répliquer » pour plus tard et dans le doute, le baril revient là où il était il y a trois semaines et tout le monde semble se détendre un peu. Sauf les gens qui habitent au Sud Liban. Ce matin, le baril est à 70.85$ sur le WTI et à 74.47$ sur le Brent.

La Chine, les sacs à main et les cravates avec des oiseaux qui s’envolent

Hier soir il y avait aussi une autre société qui publiait ses chiffres. Une dont on parle une chiée depuis que les Chinois ont annoncé un stimulus. Ou plutôt une dont on parle à chaque fois que les Chinois sortent un stimulus depuis 18 mois. Oui, il s’agit de LVMH. Le conglomérat du luxe d’un des hommes les plus riches du monde (pas celui qui fait des voitures électriques et des fusées, ni celui qui fait joujou avec des yachts et sa femme en plastique) a donc annoncé des chiffres en-dessous des attentes. Pour faire simple, le chiffre d’affaire est en baisse, les ventes reculent de 4.4% – les analystes attendaient mieux – et puis les problématique des ventes de spiritueux en Chine vont peser sur l’avenir, sans compter que le ralentissement sur l’Asie est acté. Le Japon n’est pas au mieux et si on lit entre les lignes : ça serait pas mal que les Chinois se bougent les fesses et reviennent à Paris et à Milan faire du shopping et acheter quelques produits qui sont fabriqués chez et qui sont revendus 20 fois plus chers dans des boutiques où il faut prendre rendez-vous pour dépenser de l’argent.

Le titre perdait 2% hier en fin de séance et on se réjouit de voir l’ouverture à Paris tout à l’heure. Mais hier soir, aux USA, la version américaine de LVMH – l’ADR – perdait 8%. Pas sûr que ça soit mieux sur la place Vendôme ce matin. Ah oui, encore une petite nouvelle sympa à propos de LVMH, il faut savoir que le budget magique de Barnier en France, va coûter 800 millions de taxes EN PLUS à LVMH. En conclusion de la journée d’hier, on peut clairement affirmer que la microéconomie a pris le dessus sur la macro. Je n’ai pas vu un mot sur l’inflation, l’emploi ou même les taux d’intérêts. Les taux qui devraient quand même être notre préoccupation première dans 24 heures, puisque je rappelle quand même que le dîner de gala de la BCE se tiendra demain à partir de 14h30, heure de Bruxelles.

L’Asie qui suis le mouvement

Ce matin l’Asie est partagée. La Chine et Hong Kong repartent à la hausse de façon homéopathique et le Japon fait comme les vendeurs américains hier soir : ils tapent sur la technologie. Le Nikkei est en baisse de 1.87%. Shanghai progresse de 0.25% et Hong Kong est en hausse de 0.75%. Pour le moment, l’or se traite à 2683$ et le Bitcoin semble vouloir s’envoler et est en train de tester les hauts du range du canal descendant dans lequel il se trouve depuis 6 mois. Une apparition au-dessus des 70’000$ changerait complètement la donne alors que les candidats américains font tout ce qu’ils peuvent pour séduire l’écosystème crypto.

Dans les nouvelles du jour, on parle beaucoup de « l’affaire ASML » et il va falloir quelques jours pour digérer l’info – à moins que Taïwan Semi’s nous fasse un truc demain. Il y a aussi Musk qui a remis la main au portemonnaie pour booster la dernière ligne droite de la campagne de son ami Donald. Et puis, il y a Eli Lilly qui a signé un pacte de collaboration avec le gouvernement britannique pour essayer d’améliorer le marché du travail avec ses médicaments anti-obésité, partant du principe que si les gens perdent du poids, ils vont aller plus facilement au travail et seront moins malades. L’effet magique des injections du Zepbound qui peut tout régler, même le chômage.

Nouvelles du jour

Petit détour par le secteur bancaire encore, on notera que la FINMA a demandé à l’UBS de renforcer ses plans de redressement et d’urgence « en cas d’insolvabilité pour s’assurer qu’il peut liquider ou vendre des segments d’activité sans risquer la stabilité financière ou utiliser l’argent du contribuable ». La FINMA a déclaré qu’elle avait suspendu son examen annuel des plans de gestion de crise d’UBS afin de donner à la banque plus de temps pour développer sa stratégie tout en intégrant son ancien rival. Le titre perdait 0.47% ce qui laisse supposer que l’on se fout pas mal de l’opinion de la FINMA.

Et puis, de l’autre côté de l’Atlantique, j’avais envie de revenir sur le cas de la TD BANK. La banque d’origine canadienne a été amendée de plusieurs milliards par le Département Américain de la justice. On leur reproche d’avoir violé le secret de fonction et d’avoir participé activement à des opérations de blanchiment d’argent sale. Le montant de l’amende se situe autour des 3 milliards. Mais si l’on en croit les bilans de la banque, les bénéfices de l’opération aurait rapporté bien plus. On ne va pas chipoter sur les montants, mais ce qu’il faut retenir, c’est qu’ils ont gagné plus d’argent qu’ils n’en ont perdu via l’amende. Le bénéfice de l’opération est donc positif pour la TD Bank. Et le pire dans tout ça, c’est que COMME D’HABITUDE quand une banque fait une connerie : PERSONNE N’A ÉTÉ INCULPÉ. C’est la faute la BANQUE et puis c’est tout. Encore une fois, c’est magique. J’ai pas les mots.

Chiffres du jour

Du côté macro, il n’y pas de chiffres qui valent la peine d’être attendus en ce mercredi matin brumeux – on a bien compris que c’est pas trop la saison et que tout le monde a les yeux rivés sur les chiffres du trimestre, d’ailleurs de ce côté, on notera qu’ASML ne publiera pas ce matin, puisqu’ils se sont vautrés dans leurs agendas hier, mais par contre, il y aura quand même Lagardère, DocMorris, US Bancorp, Morgan Stanley, Abbott Laboratories et Alcoa. C’est pas les boîtes les plus sexy de la planète bourse, mais il faut se raccrocher au fait que demain, il y aura TSMC et Netflix.

En ce qui me concerne, je voudrais vous souhaiter une belle journée et m’excuser de publier aussi tard puisque comme une fois par 18 mois, j’oublie de mettre mon réveil. Du coup, je suis en retard…

On se voit quand même demain, mais à l’heure !

Thomas Veillet
Investir.ch

« The only thing we have to fear is fear itself. » -Franklin D. Roosevelt