Si l’on en croit les statistiques et si l’on analyse le comportement des bourses mondiales, les marchés n’ont jamais été aussi en forme et rien ne semble pouvoir les arrêter. La question n’est plus de savoir si le S&P500 va aller à 6'000. La question est plutôt de savoir si le S&P500 ira à 6'000 avant la fin du mois d’octobre ou plutôt avant la fin de la semaine. L’optimisme semble indissociable des bourses mondiales. Il fût un temps, les places boursières étaient censées être le reflet de l’économie d’un pays. Je crois que dorénavant, nous pouvons clairement voir que cette théorie n’est que du « pipeau ». Les bourses ont leurs propres vies et les économies des pays sont dans un autre monde.

L’Audio du 7 octobre 2024

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Si l’on résume

SI l’on doit juste prendre un paragraphe pour résumer la situation : la semaine dernière les tensions géopolitiques se sont intensifiées à un point que même les experts des plateaux télé ne savent plus quoi dire sur la suite des évènements et dans la foulée, les espoirs de baisse des taux de 50 points de base ont été totalement mis de côté après l’annonce des chiffres de l’emploi « nettement plus forts » qu’attendus (même si personne ne croit une seconde à la véracité de ces données). Et pourtant, le S&P 500 a affiché sa deuxième clôture la plus élevée de l’histoire et se trouve désormais à moins de 0,5 % d’un nouveau record historique, avec les 6’000 points en point de mire. Encore une fois, peu importe la nouvelle, tout ce qui est une bonne nouvelle devient une nouvelle extraordinaire et les mauvaises nouvelles deviennent tout simplement fabuleuses.

Juste pour remettre les choses en perspective, il faut tout de même retenir que depuis le mois d’octobre de l’an dernier, le marché américain est en hausse de 40%. Pour remettre ça sous forme de chiffres ; c’est 14’000 milliards de capitalisation boursière, soit un peu moins de la moitié de l’équivalent de la dette US qui ne cesse de prendre l’ascenseur depuis que le plafond de la dette a sauté. Pour ramener ça au plus court, c’est 1’200 milliards par mois. Si je reprends les théories qui justifiaient la hausse des marchés ces dernières semaines, on nous disait que l’inflation allait revenir à 2,0 % et que la Fed allait DEVOIR procéder à des baisses de taux massives à cause du marché de l’emploi qui partait en vrille. Pour faire simple, on a continué à acheter parce que l’économie ralentissait et que la FED allait devoir la stimuler dans tous les sens pour ne pas risquer la récession – DONC, on s’attendait à de MULTIPLES BAISSES de taux pour la fêter la fin de l’année. On commençait RÉELLEMENT à croire que Powell allait baisser encore deux fois les taux de 50 BP. La seule chose dont nous avions besoin ; c’était des chiffres de l’emploi bien merdiques vendredi dernier.

Je ne l’invente pas, C’EST LE RAISONNEMENT qui était suivi par les « BULLS ». On voulait de mauvais chiffres, pour espérer encore plus de notre nouvelle drogue addictive qui se nomme le JUMBO RATE CUT. Mais c’est pas tout à fait ce qu’il s’est passé. Nous avons donc dû revoir le scénario qui était écrit.

Changement de mentalité

Du coup, on n’a même pas revu le scénario, on a juste essayé de « recalibrer » notre perception. Recalibrer notre perception est encore une phrase politiquement politicienne qui ne veut strictement rien dire, mais peu importe. Ces derniers jours, le marché s’est réinventé une nouvelle mentalité et notre manière de voir les chiffres économiques ou d’anticiper l’avenir se résume par un changement de mentalité. En fin la semaine dernière, nous avons donc appliqué une nouvelle stratégie afin de nous préparer à la publication des chiffres de l’emploi. Chiffres qui, je le rappelle, étaient tout de même LES CHIFFRES QUI POUVAIENT TOUT CHANGER…

Cette nouvelle stratégie, cette nouvelle « mentalité » pour se préparer aux chiffres de l’emploi ET FAIRE MONTER LES MARCHÉS, la voici :

Première supposition : les chiffres des Non Farm Payrolls sont supérieurs aux attentes – réaction appropriée : « Achetez des actions, nous avons évité la récession. »

Seconde supposition : les chiffres des Non Farm Payrolls sont inférieurs aux attentes – réaction appropriée : « Achetez des actions, la Fed va baisser, réduire, couper ou recalibrer ses taux. »

Troisième supposition : les chiffres des Non Farm Payrolls sont conformes aux attentes –réaction appropriée : « Achetez des actions, la Fed est sur la bonne voie pour réaliser un SOFT LANDING ».

Vous l’avez tous vu, les chiffres de l’emploi étaient meilleurs que les attentes et meilleurs que toutes les attentes de tous les analystes… Autrement dit : soit les chiffres sont magouillés pour faire croire que le marché de l’emploi a soudainement retrouvé toute sa dynamique « juste après une baisse de 0.5% sur les taux directeurs ». Soit les analystes, le marché, les économistes et la totalité des experts sont complètement cons…

Vendredi dernier, le Bureau of Labor Statistics a annoncé que l’économie américaine avait créé 254’000 emplois en septembre. Le même Bureau of Labor Statistics qui est systématiquement à côté de la plaque depuis des mois, soudainement, vendredi dernier, tout le monde l’a cru. En gros, tout ça signifie que l’économie américaine a créé 107’000 emplois de plus que prévu – c’est quand même fou l’effet magique que peut provoquer une baisse de 50 bp. Pardon, un RECALIBRAGE de 50 bp – on m’a toujours dit qu’il fallait une certaine inertie pour sentir l’effet de la baisse des taux, mais en fait de nos jours, c’est pratiquement instantané. Le taux de chômage est tombé à 4,1 %, en dessous des attentes de 4,2 %. Et le nombre d’emplois du mois d’août a été révisé à la hausse, passant de 142’000 à 159’000.Cette révision à la hausse de 17’000 emplois constitue la première révision à la hausse depuis avril 2024.

De la véritable magie

Pour faire simple, les chiffres de vendredi, ça n’était pas du tout ce que l’on attendait et la probabilité de voir les taux baisser de 0.5% lors du prochain meeting de la FED, vient juste de s’évaporer. Le catalyste de notre stratégie haussière vient de disparaître – la probabilité d’un jumbo rate cut vient de tomber à 3% depuis vendredi, le pétrole s’envole à cause de l’embrasement au Moyen Orient, il y a moins de chômage, plus d’emplois créés avec des taux plus bas, donc également plus de risques inflationnistes, mais le marché s’en cogne comme de sa première cravate Hermès. Aujourd’hui, en ce lundi 7 octobre, il faut bien comprendre que la mentalité n’est plus la même que par le passé, l’interprétation que nous faisons des informations qui nous arrivent sur la tronche à longueur de journée se résume en une longue phrase assez basique qui dit :

« Nous ne sommes plus dans une mentalité où les bonnes nouvelles sont des bonnes nouvelles et les mauvaises nouvelles des mauvaises nouvelles. Ni dans une mentalité où les mauvaises nouvelles sont des bonnes nouvelles et les bonnes nouvelles des excellentes nouvelles, nous sommes dans une mentalité où

ABSOLUMENT TOUTES LES NOUVELLES SONT EXCELLENTES !!!

Sans aucune exception, il y aura toujours un moyen de justifier ou d’expliquer pourquoi il faut acheter. Il faut accepter de vivre avec, puisque la tendance est notre amie. Jusqu’à nouvel ordre en tous les cas.

La nouvelle semaine qui commence et l’approche du camp de base des 6’000 points

La semaine qui commence promet à nouveau d’être intéressante, surtout afin de voir sous quel angle nous allons prendre les chiffres qui vous nous tomber dessus. Non, parce que si la semaine dernière c’était la semaine de l’emploi, celle qui commence ce matin sera la semaine de l’inflation et aussi du début de la saison des trimestriels. Mais revenons à l’inflation, jeudi le CPI sera publié aux USA et le PPI arrivera vendredi. On s’attend à une confirmation comme quoi l’inflation est en train de continuer son pèlerinage en direction des 2%, ce qui devrait continuer à rassurer les marchés. Bon, en même temps, c’est la même administration qui calcule le CPI et les NFP’s, ça serait quand même étonnant qu’ils nous disent le contraire. Ça serait gâcher la belle dynamique mise en place vendredi dernier. En plus des chiffres de l’inflation, il y aura aussi les Minutes du FOMC meeting qui seront publiées mercredi et qui nous dirons tout ce que l’on sait déjà sur les intentions de la FED, mais comme des fois on nous répète 22 fois le même truc avant que l’on comprenne et que l’on réagisse, on ne sait jamais.

Pour entamer cette seconde semaine et attendre les chiffres des banques de vendredi, on notera que le Japon est en hausse de 2%, que Hong Kong grimpe de 1.15% et que la Chine est encore fermée. Elle sera à nouveau parmi nous dès demain pour confirmer que le rallye dû au stimulus, c’est bien pour de vrai. En attendant, le baril est à 74.17$ et on attend toujours la réplique d’Israël. Ça commence à prendre du temps et casse le rythme qui était imprimé ces derniers temps. Alors oui, les bombardements continuent ailleurs, là où personne ne peut répliquer, mais toujours rien contre l’Iran. L’or est à 2803$ et le Bitcoin est à 63’700$.

Les nouvelles du jour

C’est un lundi qui commence tout en douceur. On parle de plus en plus des élections américaines, qui seront probablement une des discussions centrales ces 4 prochaines semaines. Il faut reconnaître que l’on se réjouit que ça se termine étant donné le niveau ras des pâquerettes de cette campagne. Ce week-end, le prompteur de Kamala Harris est tombé en panne pendant un meeting et on a pu se rendre compte que sans ça, elle ne sait même pas quoi dire. De l’autre côté, Trump est retourné là où il s’était fait tirer dessus et il a fait venir Elon Musk qui sautillait sur scène comme une dinde qui serait sous stéroïdes, c’était pathétique. Et puis ce matin, selon une commission d’étude qui ne prend pas parti, on apprend que si Trump est élu, il fera monter la dette plus que Kamala Harris. Il est vrai que ça n’est pas partisan du tout et surtout super-crédible quand on voit ce que le gouvernement Biden a fait de la dette, sans parler de celui d’Obama…

On retiendra que Foxconn a battu les attentes lors de la publication de leur trimestre et tout ça grâce à l’IA. On se réjouit de voir ce que cela va faire chez Apple, puisque l’on sait tous que Foxconn ne peut aller bien si Apple va mal. On parle aussi beaucoup de Tesla et d’Elon Musk, puisque le 10 octobre, le patron du fan club de Trump va devoir présenter la suite de sa stratégie « robotaxis » et convaincre les actionnaires que Tesla n’est pas qu’un fabricant de voitures électriques. À l’approche de cet évènement qui pourrait redessiner l’avenir de Tesla (encore une fois), tout le monde y va de ses prédictions. Vivement jeudi. Autrement, Goldman Sachs pense qu’une attaque israélienne sur les infrastructures pétrolières iraniennes pourrait faire monter le baril de 20$ et dans la série « prévisions 2025 », la SocGen a déclaré que le stimulus chinois pourrait faire monter le marché local de 15% de plus. Ça tombe bien, en une semaine avec le marché fermé on a fait deux fois ça, mais là, sur les 14 prochains mois, on a encore 15% de plus à se faire, ça va être passionnant.

Les chiffres du jour

En ce lundi, il n’y aura pas de chiffres à retenir, en revanche cette semaine il y a 18 membres de la FED qui vont parler. Autant vous dire que si l’on veut interpréter des trucs, il y aura de quoi faire. Pour le moment, les futures sont inchangés et il ne se passe rien.

Il me reste à vous souhaiter un excellent début de semaine et on se retrouve demain. Je précise encore que ce soir il y aura webinaire chez Swissquote, Marco Rastaldi et moi-même allons revenir sur notre portefeuille modèle et sur bien d’autres choses. N’hésitez pas à vous inscrire, c’est gratuit et vous pouvez poser toutes vos questions à la fin ! Le lien se trouve ci-dessous :

Webinaire Swissquote

Belle journée à tous et à demain pour ceux qui ne seront pas là ce soir !

Thomas Veillet
Investir.ch

“In three words, I can sum up everything I’ve learned about life: it goes on.” – Robert Frost