Samedi matin, j’ai passé pas mal de temps à préparer ce que j’allais bien pouvoir écrire en ce lundi matin. Notre éternelle capacité à voir le verre à moitié plein après les chiffres du PPI de vendredi, la saison des trimestriels qui allait commencer « pour de vrai » cette semaine et le fait que la « politique » ne semblait plus influencer les marchés que ça soit en France ou aux USA. Et puis il y a un gars qui a décidé de tirer sur Donald Trump et tout ce que j’avais griffonné sur mon cahier ne faisait soudainement plus aucun sens, puisque la totalité des médias ont immédiatement switché sur la tentative d’attentat et ont oublié le reste.

L’Audio du 15 juillet 2024

Télécharger le podcast

POTUS

Donc, si l’on fait abstraction du PPI de vendredi qui n’était pas « aussi » bon que le CPI de jeudi, nous sommes toujours absolument convaincus que les taux vont baisser en septembre parce que l’inflation a définitivement pris le chemin de la niche. Les prix ont augmenté de près de 20% sur les trois dernières années et ils vont continuer de le faire – mais moins – alors ça va bien se passer et il n’y vraiment plus de raisons de s’inquiéter. Si l’on fait également abstraction du fait que les publications des banques qui ont commencé vendredi n’étaient pas réellement fantastiques – globalement si l’on se concentre sur le « net », ça va encore, mais lorsque l’on gratte un peu à l’intérieur, il y a quand même des licenciements des restructurations et des provisions pour les dettes pourries à venir – il n’y a donc pas trop de quoi danser sur les tables. JP Morgan était en baisse de 1.21%, Wells Fargo reculait de près de 6% et Citi – qui licencie 8’000 personnes et qui a battu les attentes, abandonnait quand même 1.8%. Et si l’on oublie de parler du fait que la Chine a publié des chiffres économiques plus que médiocres ce matin, avec un PIB en-dessous des attentes et une production industrielle moins pire que prévue, mais pas terrible quand même, il est vrai que l’on se rend compte que le seul sujet qui préoccupe le marché c’est celui de la tentative d’assassinat manquée sur Donald Trump, du fait qu’il est automatiquement devenu martyr et que plus personne n’a de doute sur le fait qu’il sera le prochain Président Américain.

La question que l’on peut se poser et que l’on doit se poser, c’est de savoir si ce qui s’est passé hier en Pennsylvanie a le pouvoir de changer le comportement des place boursières mondiales dans les prochaines heures ? Si l’on regarde ce qui est en train de se passer, j’aurais tendance à dire que non, ça ne changera rien. Comme les errances de Biden n’ont rien changé, le non-assassinat de Trump devrait au pire faire légèrement monter le marché, mais rien de plus. Ce matin à 5 heures, les future américains étaient en hausse de 0.2% et le titre de la société de Donald Trump, Trump Media & Technology était en hausse de 20%. Autant vous dire que ceux qui attendaient des secousses sur les marchés vont en être pour leurs frais.

La situation actuelle

Il faut dire qu’avant qu’un type qui s’appelle Thomas (quelle idée), monte sur un toit avec un AR15 pour tirer sur Trump, la situation électorale était plutôt claire. Biden était en train de perdre la boule, même son camp ne voulait plus de lui et à chaque intervention télévisée, la totalité des médias étaient à la recherche de la prochaine bourde pour la mettre dans le journal du soir. Avant la tentative d’assassinat, la question n’était plus de savoir SI Biden allait renoncer, mais plutôt « QUAND est-ce que Biden allait renoncer ?». Et puis, depuis hier la question ne se pose même plus. Il y a même des Démocrates qui disent qu’ils ont déjà accepté le fait que Trump allait gagner et qu’il n’y a aucune raison de retirer Biden de la course, puisque les jeux sont déjà faits. Aujourd’hui, même si les Démocrates avaient le pouvoir de faire revenir Kennedy pour affronter Donald Trump pour le job, ça serait quand même plié d’avance.

Cela aura donc coûté une oreille à Donald Trump pour s’assurer de son second mandat. Il est incroyable de se rendre compte que tout le monde haïssait Trump il y a encore trois jours et que depuis hier, le monde entier envoie ses vœux de prompt rétablissement parce que la politique ne se joue pas sur le terrain de la violence et qu’à la fin ça n’est qu’un jeu de magouilles et de pouvoir et qu’il n’y a quand même pas de raison de se coller une balle dans la tête pour ça. Bref, en l’espace de quelques coups de feu et d’une oreille ensanglantée, Donald Trump s’est racheté une virginité et une légitimité, à la limite, depuis hier, même ceux qui aimeraient voter Biden ne vont plus oser le dire. Alors bien sûr, ça n’est pas terminé et il peut encore se passer plein de choses, mais à la lecture des médias américains depuis 24 heures, Trump est devenu un héros national et dire du mal de lui est devenu extrêmement mal vu et pour ce qui des marchés financiers, ils s’en foutent complètement. On espère donc que l’on va pouvoir se concentrer sur l’avalanche de chiffres trimestriels qui vont commencer à nous tomber dessus dès ce lundi et commencer à anticiper ce que va faire Lagarde ce jeudi. Le tout sans oublier que l’on commence à parler d’un « JUMBO BAISSE DES TAUX » à venir.

La jumbo baisse

Oui parce que si vous étiez en vacances la semaine dernière, vous n’avez pas pu apprendre que l’inflation est définitivement vaincue aux USA et que dorénavant, la probabilité de voir les taux baisser en septembre est de plus de 90% – un peu comme la probabilité d’avoir Trump à la Maison Blanche en janvier – la FED n’a (bien sûr) rien confirmé au sujet de la baisse des taux (et au sujet de Trump non plus, d’ailleurs), mais le marché a déjà pris de l’avance. Il faut dire que le CPI a montré sa faiblesse APRÈS que Powell ait déclaré qu’il avait besoin de plus de données pour prendre une décision. Mais peu importe l’avis de Powell, le marché a déjà anticipé la baisse de septembre – comme il l’avait fait pour celle de mars 2024 et cette « certitude » acquise a fait également augmenter la probabilité de voir la FED baisser les taux de 0.5% en décembre – en guise de cadeau de Noël.

Les impacts éventuels de l’attentat… basé sur les évènements du passé en 1’20… (n’oubliez pas de vous abonner sur Instagram)

Je crois que l’on peut donc dire que l’optimisme est toujours bien présent dans le marché et l’on voit de plus en plus mal ce qui pourrait le faire changer d’avis. La saison des trimestriels sera bien sûr très importante, mais tout cela ne dépendra pas de la réalité des faits, mais plutôt de l’interprétation que nous allons faire de ces chiffres et de l’écart entre les attentes des sociétés et nos attentes (à nous, investisseurs et experts en finance). Tout en gardant à l’esprit que nous sommes très très optimistes et très très exigeants. Mais pour être franc avec vous, le sentiment d’un marché indestructible est de plus en plus évident. L’indice du Greed and Fear de CNN démontre que nous sommes repassés dans le camp de l’avidité et l’indice de la volatilité est en train de retourner en zone de coma – ou, autrement dit : en zone de « même pas peur !!! » et ça n’est pas une rafale d’AR15 qui va nous faire trembler.

L’Asie, le Bitcoin et les T-shirts de Trump qui lève le poing

Ce matin le Japon est en vacances et le reste de l’Asie subit les mauvais chiffres économiques chinois et la tentative d’attentat sur Trump. Hong Kong est en baisse de 1.47% et la Chine ne fait rien. On se demande si la Chine est contente ou déçue de voir Trump s’en sortir tout en sachant qu’il y a bien des chances qu’ils le retrouvent sur leur chemin dans quelques mois, on peut se poser la question. Pendant ce temps, le pétrole est à 81.15$, l’or est à 2416$ et depuis l’attentat d’hier, le Bitcoin s’envole comme un seul homme, il faut dire que Trump est « LE PRÉSIDENT » du Bitcoin, ceci expliquant cela. Le BTC est à près de 63’000$.

Pour le reste des nouvelles du jour, inutile de vous dire que l’ensemble de la presse est devenu experte en technique de snipers et que tout le monde sait qui était l’assassin potentiel avec force et détails. La théorie du complot a déjà fait son apparition sur « X » et on dirait qu’il ne s’est rien passé d’autre dans le monde. Pourtant, il faudra tout de même se souvenir que Jamie Dimon, patron incontesté de JP Morgan a répété encore une fois qu’il faut se méfier parce que l’inflation et les taux pourraient bien rester élevés et que la FED n’a pas encore gagné, mais visiblement le marché n’est pas d’accord avec lui. Tom Lee, le méga-bull parmi les méga-bulls, pense que le S&P peut tripler d’ici 2030 et puis, depuis quelques jours, Tesla ne détient plus 50% du business de la voiture électrique, la concurrence fait rage.

Le reste, un rachat, la FTC et des chiffres à venir

Mais peut-être que la seule vraie nouvelle financière du jour c’est le Wall Street Journal qui en parle, puisque selon le journal, Google serait sur le point de racheter la start-up WIZ. Wiz est active dans la cybersécurité et le moteur de recherche aurait posé 23 milliards sur la table pour boucler le deal. Ce serait la plus grosse acquisition de l’histoire de Google. La start-up avait été valorisée à 12 milliards après un round de financement au mois de mai. Il faudra encore avoir l’approbation de la FTC (Federal Trade Commission) et la confirmation officielle du deal. En ce qui concerne la FTC ; les « experts » estiment que ça devrait passer et en y réfléchissant un peu plus, on commence à se dire qu’avec l’arrivée de Trump au pouvoir dans les mois à venir, la FTC devrait se détendre et être un peu moins autoritaire que sous l’ère Biden. Comme quoi quand on veut, on arrive à voir plus loin que demain matin.

La semaine qui nous attend sera donc riche en publications trimestrielles, riche en discours de membres de la FED – dont Jerome Powell – pas plus tard que ce soir, ainsi que la BCE ce jeudi. Mais en ce lundi matin, nous allons devoir nous contenter des ventes de détail en Allemagne et du PPI en Suisse, pas de quoi faire briller la macro en ce début de semaine. Côté chiffres du trimestre, il y aura Goldman Sachs et BlackRock et Swatch.

Pour l’instant, les futures sont donc en hausse de 0.14% et si l’on se base sur les statistiques du passé, les grands évènements, types attentats ou assassinats, n’ont eu que peu d’impact sur les marchés – en 63, lors de l’assassinat de Kennedy, le marché a eu besoin de 48 heures pour repasser en positif. Il a fallu 307 jours pour oublier Pearl Harbor et 189 pour faire passer l’invasion du Koweït dans les détails de l’histoire. Autant dire que ce qui s’est passé hier aux USA, ne devrait même pas rentrer sur les tabelles, si ce n’est comme « le jour où Trump a remporté les élections ».

Excellente journée à tous et on se revoit demain pour de nouvelles aventures !

Thomas Veillet
Investir.ch

“Everything in life is luck.”

Donald Trump