Cette semaine est donc dévolue aux chiffres de l’emploi. Nous le savions au début de la semaine et les choses commencent à se mettre en place. Hier les premiers chiffres sont tombés et ils étaient nettement en-dessous des attentes. Le nombre de postes à pourvoir est en baisse et c’est donc encore signe supplémentaire comme quoi l’économie est en train de ralentir. Immédiatement après la publication de ces données, la probabilité de voir une baisse des taux en septembre est montée à 65%. Le plan de la FED fonctionne. Sauf que l’inflation ne baisse pas vraiment et qu’il va falloir qu’elle le fasse bientôt. Sinon…

L’Audio du 5 juin 2024

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L’économie ne va plus si bien que ça…

Sinon, on va commencer à se poser des questions. D’ailleurs, on s’en pose déjà. Les marchés américains ont terminé en hausse parce qu’ils étaient satisfaits de voir que l’emploi ralentissait et que la FED allait pouvoir baisser les taux – oui, parce que là tout de suite, plus personne n’a de doute – les Non Farm Payrolls de vendredi vont sortir en-dessous des attentes et les choses vont devenir évidentes pour la FED – mais de l’autre côté de l’Atlantique, chez nous, en Europe, on a commencé à se demander si le risque n’était pas en train de se déplacer ailleurs.

En Europe on se rend compte que le pétrole se pète la figure, même si l’OPEP veut continuer à réduire la production. Au début on s’est dit que c’était parce que le communiqué de presse laissait poindre des signes de détente du côté des pays pétroliers, mais depuis hier matin on commence à se dire que si le pétrole s’effondre, c’est aussi parce que l’économie est peut-être en train de ralentir. Et on peut faire et dire ce que l’on veut ; on veut bien monter en anticipant une baisse des taux parce que l’inflation est vaincue, mais on est beaucoup moins chaud si l’économie commence à se planter et que l’inflation reste trop forte.

On y croit encore, mais…

Actuellement, notre cœur balance entre la joie de voir l’emploi se détendre et le plan de la FED se dessiner un peu plus clairement – mais il y a tout de même des doutes qui commencent à poindre à l’horizon. Depuis la danse de la victoire que Powell a effectué à la fin octobre, nous avons tous systématiquement appliqué la stratégie du : « si les taux baissent, les marchés vont monter » et comme l’inflation était presque vaincue, on s’est dit que le soft-landing était à nos portes et que Jerome Powell était ce qui se rapprochait le plus d’un Dieu descendu sur Terre.

Sauf que là tout de suite, en faisant un petit bilan de ce qui se passe, on notera tout de même qu’au jour d’aujourd’hui, l’économie américaine c’est :

– 63 banques au bord du défaut de paiement selon la FDIC – rapport publié ce week-end dont tout le monde se fout comme si c’était de la science-fiction.

– Plus de 500 milliards de dollars de pertes sur les créances détenues par les banques

– Une croissance du PIB qui est en baisse

– Une inflation qui ne veut pas baisser (c’est en tous les cas ce que disent les derniers chiffres), même si ça risque d’aller mieux avec le baril qui baisse, mais moins bien avec l’électricité qui monte

– Selon un dernier sondage, c’est aussi plus de 50 % des Américains qui pensent que la récession est déjà parmi nous.

– La demande de prêts hypothécaires qui est au plus bas depuis plus de 30 ans

– Une dette totale des ménages record de 17’700 milliards de dollars – sans compter plus de 1200 milliards rien qu’en cartes de crédit avec des taux au-dessus de 20%

– Un gouvernement américain qui est endetté à hauteur de 34’000 milliards avec des intérêts de la dette qui sont totalement délirants

– Des élections très compliquées qui approche avec un combat entre un mec qui est aux portes de la prison et un autre qui passe plus de temps à échanger avec son prompteur qu’avec les électeurs

Comment est-ce que l’on peut imaginer que l’on va avoir un SOFT-LANDING avec ça ? Alors oui, l’Intelligence Artificielle va sûrement tout régler et il n’y aura plus jamais aucun problème. Mais disons que là tout de suite, on a tout de même un peu l’impression que la mécanique du « je vais monter les taux pour freiner l’inflation, puis je les rebaisserai quand l’inflation sera revenue à 2%, juste avant que l’économie commence à ralentir », est un tout petit peu en train de se gripper. Powell l’avait d’ailleurs dit : « je préfère devoir sortir le pays de la récession que devoir me battre contre l’inflation ».

À la fin ça monte et on s’en fout…

Hier les marchés US ont donc terminé en hausse parce que nous étions rassurés de voir que la probabilité d’une baisse des taux se rapprochait de plus en plus. Mais en même temps, le rendement du 10 ans s’effondre et le baril aussi. Et nous sommes de plus en plus préoccupés par les messages de mise en garde au sujet de l’économie qui ne semble plus être en train de ralentir, mais plutôt en train de planter les freins alors que l’inflation, elle, se trouve toujours en roue libre.

Pour être franc avec vous, lorsque l’on regarde le comportement du marché et les configurations techniques, on a vraiment l’impression que l’on va aller chercher les plus hauts de tous les temps et que Nvidia va rattraper Apple et Microsoft, mais pour le reste, il y a tout de même des signes de fissures dans l’économie qui ne doivent pas non plus être ignorées. La volatilité est toujours au plus bas, mais les indices de stress reviennent dans la zone de PEUR, alors que le marché ne baisse toujours pas. Je ne sais pas d’où est-ce que le coup de massue va venir, mais il risque bien de ne pas faire plaisir. Surtout que l’ensemble de la communauté financière voit le S&P500 bien plus haut dans six mois et cela, sans le moindre doute. Peut-être que finalement, la FED va baisser les taux en septembre et c’est là que tout va craquer et qu’on se souviendra des premiers indices qui ont fait leur apparition à l’aube de l’été.

L’Asie et le reste

Ce matin l’Asie est partagée, le Japon est en baisse de 1% après la publication de chiffres peu rassurants du côté des salaires. Des salaires qui sont un peu trop élevés au goût des économistes (mais sûrement pas des salariés), salaires trop forts qui pourraient entraîner un resserrement des conditions monétaires. Hong Kong est en hausse de 0.3% et la Chine est en BAISSE de 0.3%. De ce côté-là, on attend juste de voir ce que les Américains nous réservent côté emploi. Même si les intervenants du Far-East pensent que l’emploi peu poser un problème, connaissant la capacité de magouilles sur les chiffres des Non Farm Payrolls, je suis plus que certain que l’on va nous sortir un joli petit chiffre bien soigné qui va nous permettre d’espérer une baisse des taux en septembre à 75% – tout en nous laissant le doute sur la suite des évènements, sinon ça ne serait pas drôle.

Comme l’économie est en train de ralentir, tout le monde vend le pétrole, parce que bien sûr que cet été l’ensemble de l’Occident partira au camping en vélo. Le baril est à 73.22$ et l’or est à 2355$. Le Bitcoin est en train de nous refaire une tentative au-dessus des 70’000$ – actuellement il est à 71’000$ – le second étage de la fusée est-il en train de s’allumer ?

Les nouvelles du jour

Du côté des nouvelles du jour, il y a BlackRock et Citadel qui veulent créer un nouveau « Stock Exchange » au Texas pour concurrencer le New York Stock Exchange. On se réjouit de voir comment ça va se passer. Après 30 ans de centralisation des places boursières et le passage à l’électronique, sans compter que certains veulent ouvrir les bourses 24 heures sur 24, on veut créer des places de bourses décentralisées. Je crois que finalement, c’est une bonne chose si l’IA pouvait prendre le dessus sur l’humain et rationaliser certaines de ses conneries. Des conneries comme promettre d’aller se baigner dans la Seine ou revendiquer le sauvetage de l’économie d’un pays, ou la création de différentes places de bourses pour traiter les mêmes choses. Comme si ça n’était pas assez compliqué comme ça.

Autrement, hier Game Stop a terminé en baisse de plus de 5% et il y a la SEC locale du Massachussetts qui a lancé une enquête sur Roaring Kitty et sur ce qui se passe sur GameStop pour « suspicion de manipulation de marché ». Donc, aux USA on a un organe de surveillance : la SEC et comme la SEC ne fait pas son boulot, c’est une antenne locale de la région de Boston qui s’y colle. En tous cas, il y a une chose qui est bien, c’est que dans ce genre de cas, on se rend compte qu’il n’y pas que les Suisses qui sont à la ramasse niveau régulation… (Salut amical au hold-up du Crédit Suisse)… D’ailleurs, mis à part ça, S&P a relevé la note de l’UBS sur stable après l’intégration du Crédit Suisse, justement. Mis à part ça, Modi a gagné les élections mais a perdu la majorité, ce qui crée des tensions sur les marchés indiens. Et puis, ce matin les marchés européens devraient ouvrir en hausse, parce que tout le monde attend la baisse des taux de demain, jour des 80 ans du débarquement.

Les chiffres du jour

Côté chiffres du jour, nous aurons les PMI’s des services en Europe, ainsi que le composite. Il y aura les chiffres ADP de l’emploi américain – chiffres qui sont censés donner la tendance de ceux de vendredi, même si ça fait des mois que ça ne fonctionne plus. Et aux USA il y aura aussi le PMI des services + composite, ainsi que l’ISM non-manufacturier – encore une bonne occasion de voir que l’économie est en train de se rapprocher du mur à grande vitesse. Et puis, nous aurons aussi les inventaires pétroliers qui devraient exploser, puisque plus personne n’en veut.

Pour le reste, moi je vous souhaite une très belle journée et on se voit demain, au même endroit et à la même heure. J’en profite pour vous recommander de vous abonner à la newsletter d’Investir.ch – si ça n’est pas déjà fait – il vous suffit d’entrer votre adresse mail dans la case prévue à cet effet en haut à droite du site juste en-dessous du MOT : NEWSLETTER… Et puis, pour ceux qui veulent assister au Swissquote Trading Day présenté par …moi-même.. le 12 juin à Lausanne, n’hésitez pas à vous inscrire en cliquant sur le lien ci-dessous…

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Excellente journée et à demain !

Thomas Veillet
Investir.ch

“Assume life will be really tough, and then ask if you can handle it. If the answer is yes, you’ve won.” Charlie Munger