Le mercredi qui précède Thanksgiving n’est généralement pas la séance la plus passionnante de l’année. Aux USA, tout le monde veut partir tôt pour aller rejoindre la famille aux 4 coins des États-Unis, pendant ce temps en Europe on se dit que l’on peut largement se passer de l’influence des Américains et les volumes fondent comme neige au soleil. Ce qui n’a pas vraiment changé, en revanche, c’est l’optimisme généralisé dont on fait preuve en partant du principe que la hausse des taux, c’est fini et que – forcément – la FED finira bien par baisser les taux un jour – c’est un « mantra » qui continue de pousser les marchés à la hausse sans se retourner et sans écouter les choses qui dérangent.
L’Audio du 23 novembre 2023
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Pas d’activité débordante
Lorsque l’on regarde la presse de ce matin ou de cette nuit, on n’a pas le sentiment que nous avons eu une journée passionnante et débordante d’activité. L’ensemble des marchés, que ça soit en Europe ou aux USA, étaient en hausse. Mais c’était une hausse homéopathique, sans grande nouvelle qui était susceptible de changer le monde ou même la direction du marché. Ce qu’il faut retenir – pour l’instant – c’est que la semaine est pratiquement terminée et l’absence des Ricains ne va pas aider et qu’en plus, nous avons toujours cette tendance impressionnante à ne voir que les bonnes choses dans tout ce qui est publié ou annoncé.
Hier il y avait deux ou trois choses qui retenaient l’attention des intervenants et comme tout n’était que joie et bonheur dans ces quelques annonces, les marchés ont donc terminé dans le vert. La première chose qui aura été fascinante à observer, c’est le feuilleton de Sam Altman. L’ex-futur-patron d’Open AI qui s’est donc fait virer par le Board d’Open AI pour aller se réfugier chez Microsoft, et qui va donc retourner chez Open AI, mais seulement si l’ensemble du Board démissionne avec effet immédiat.
La nouvelle en soit ne devrait pas avoir grande importance pour les marchés, mais comme c’est de l’intelligence artificielle, ça change tout. Et comme EN PLUS, Microsoft est maqué avec OpenAI, ça fait bouger Microsoft – et comme Microsoft, c’est Microsoft, la télénovela d’Altman n’en est que plus savoureuse. Cependant, ce qui est absolument fabuleux dans cette histoire c’est que ; QUOI QU’IL ARRIVE, ça fait monter Microsoft. Prenez l’autre jour, quand Altman s’est fait virer – on aurait pu craindre un impact baissier sur Microsoft étant donné leur niveau d’implication avec OpenAI. QUE NENNI. Microsoft est monté parce que « ça ne changeait rien pour eux ». Et puis ensuite, c’est monté encore plus parce qu’ils ONT ENGAGÉ Altman et sa garde rapprochée. Après, hier, Altman est reparti chez Open AI. Alors là on aurait pu se dire que ça allait baisser parce qu’Altman repartait. MAIS QUE NENNI ENCORE, non seulement ça ne change rien pour Microsoft parce qu’ils sont DÉJÀ impliqués avec OpenAI. Bref. Je crois que l’on a trouvé le concept de la hausse perpétuelle et que tant qu’Altman et Microsoft sont dans la même phrase, ça montera. Et puis c’est sans oublier que le cycle de hausse des taux, c’est fini et que la FED elle va bien finir par les baisser. Les taux.
Bonnes Nouvelles chapitre 2
Dans les mauvaises nouvelles qui ne sont pas si mauvaises que ça, nous avons également assisté à la publication des chiffres des demandes d’indemnités chômage hebdomadaire aux USA – plus communément appelées les Jobless Claims. D’habitude ça sort le jeudi, mais là le jeudi, y a dinde alors on a tout sorti le mercredi avant que les gens se cassent en week-end. Ce qu’il faut savoir – à propos des Jobless Claims – c’est que la semaine dernière, on avait utilisé ces chiffres pour « signaler » au monde entier que l’emploi ralentissait ENFIN, que le plan de la FED pour faire ralentir l’emploi fonctionnait comme une horloge et que Powell, il est quand même vachement beau. Le chiffre de la semaine dernière était PLUS FORT que les attentes, ce qui signifiait que plus de monde que prévu avaient besoin du chômage parce qu’il n’y avait pas assez de boulot.
Oui, parce qu’à l’heure actuelle, ON A BESOIN de voir l’emploi ralentir pour corroborer la stratégie de la FED. Si l’emploi ralenti, hop ! Pas de hausse des taux. Hier on attendait 227’000 demandes d’indemnités et c’est sorti à 209’000. C’est nettement plus faible et c’est nettement en-dessous des attentes, mais c’est aussi la plus forte baisse depuis juin. Ce qui aurait tendance à signaler que l’emploi va bien et que DONC… Si l’on part de la réaction de la semaine dernière, on pourrait largement s’inquiéter du fait que le plan de la FED ne marche pas aussi bien que prévu et que DONC… on pourrait commencer à réfléchir un peu sur le fait que la fin de cycle de hausse des taux n’est peut-être pas encore inscrite dans le marbre ! MAIS QUE NENNI !!!!!!!!! C’était sans compter notre fabuleuse capacité à interpréter un « mauvais chiffre » et lui faire cracher ce qu’il a de bon en lui ! Hier, le marché a donc traduit cela par :
« S’il y a moins de demandes d’indemnités, c’est que l’économie est forte MALGRÉ les hausses de taux, l’économie est donc RÉSILIENTE !!! »
Et ça, c’est trop bon et si ça se trouve en plus ça n’est que temporaire parce qu’ils ont simplement engagé des Pères Noël pour la période des fêtes. Ça ne remet donc pas le Bull Market en question. Encore une fois, nous avons eu successivement deux nouvelles qui ont une signification diamétralement opposée, mais le marché est monté quand même. Elle est pas belle la vie ??? Et puis c’est sans oublier que le cycle de hausse des taux, c’est fini et que la FED elle va bien finir par les baisser. Les taux.
Rififi sur le baril
La troisième GROSSE nouvelle de la journée, c’est pas Nividia qui baissait de 2.5% à cause de ses trimestriels, ça n’est pas John Deere qui reculait parce que l’avenir n’est pas rose, ça n’est pas la mise en place du cessez-le-feu à Gaza et la libération de 50 otages et c’est encore moins le fait que tous les analystes qui ont le mot « BULLISH » tatoué sur le front sont TOUS VENUS sur CNBC pour dire que le S&P500 va à 5’000 dans les semaines qui viennent. Un peu comme tous les stratégistes BEARISHS étaient venus sur le même plateau le 29 octobre pour nous annoncer qu’on allait tous mourir dans les jours à venir.
Non, la troisième GROSSE NOUVELLE de la journée c’est le fait que les gentils producteurs de pétrole de l’OPEP ont l’air de se prendre violemment la tête et ne semblent pas tous d’accord sur la suite des choses à faire au sujet de la production pétrolière. Normalement, une réunion « petits fours et barils de pétrole » était censé se tenir en fin de semaine, mais au vu du fait qu’ils ne sont pas du tout d’accord entre eux sur les coupes de production à venir – l’Arabie Saoudite est partie ronchonner dans son coin et le meeting de l’OPEP a été botté en touche à une date ultérieure. Comme le plafond de la dette américaine. Oui bon, parce que l’on sait aussi que quand les Saoudiens sont pas contents, ça finit souvent en steak haché, alors autant attendre que ça se calme.
Donc. On aurait pu se dire que les dissensions allaient créer une instabilité sur le baril et le propulser à la hausse. MAIS QUE NENNI ! On s’est dit que les dissensions c’est pas bon, du coup le pétrole s’est fait déglinguer de près de 5%. Et c’est à ce moment que nous avons un talent fou pour trouver le bon au milieu d’un océan de merde, parce que l’on s’est dit : « en plus, si le baril baisse, ça veut dire que l’inflation baisse et que la FED a raison sur toute la ligne ». BREF, à la fin quoi qu’il se passe, peu importe ce qui est publié, nous avons développé un talent inouï pour trouver TOUJOURS UNE BONNE NOUVELLE, même si la nouvelle en question est mauvaise. On dirait un labrador qui retrouverait une croquette au milieu d’un champ de maïs de 5 hectares.
Et en Asie, c’est Thanksgiving aussi
Ce matin l’Asie ne fait rien parce que… ben les USA sont fermés pour 4 jours. Alors non, c’est inexact ; les USA seront ouverts pour le Black Friday, mais seulement la moitié de la journée. Mais autant vous dire que ceux qui sont partis hier en week-end, ne vont pas revenir pour une demi-journée vendredi. Du coup les trois indices vedette de la région sont collés au fond du panier et il ne se passe rien. Le pétrole est à 76.29$, l’or est à 1994$ et le Bitcoin est à 37’350$.
Dans les nouvelles du jour, vous vous en doutez, c’est plutôt calme, mais il y a tout de même Ermotti – le patron de l’UBS qui a demandé que la FINMA dispose de pouvoirs accrus et que des sanctions soient prises à l’encontre des banquiers négligents, à la suite de l’effondrement du Crédit Suisse. Je ne sais pas ce qui se passe, mais là on est sur de la nouvelle génération de banquier – il y a un truc qui se passe. Dans 2 semaines, il va proposer de faire du bénévolat et baisser les frais des clients. Peut-être remettre le secret bancaire en vigueur en disant aux Américains d’aller se faire voir. Autrement dans la suite de l’affaire Binance, il y aurait déjà eu 1 milliards de fonds qui ont été retirés et en Australie, les fermiers ont trop de moutons et ils les donnent gratuitement à ceux qui les veulent. Faut juste aller les chercher.
On voit que quand il y a ce type de nouvelle sur CNBC -c’est qu’il est temps de partir en week-end. Ce que je vais faire de ce pas. On se revoit donc lundi pour un nouvel épisode de ce fabuleux Bull Market qui va nous emmener à 5’000 sur le S&P500 pour toutes les bonnes raisons que l’on connaît et pour celles que l’on va inventer !
Excellent week-end à tous et à lundi !
Thomas Veillet
Investir.ch
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