Les jours du mois de juillet se suivent et se ressemblent. D’abord il fait moche tous les jours et la problématique de l’Europe Centrale se situe plus au niveau des intempéries qu’au niveau des bourses, mais comme mon job c’est pas de m’occuper de la météo, mais plutôt de vous faire croire qu’il y a encore un ENORME intérêt pour la finance mondiale au milieu de l’été, j’ai quand même trouvé 2-3 trucs qui valent la peine d’être abordés.

L’Audio du 16 juillet 2021

Télécharger le podcast (.mp3)

La tech dans le pâté

Tout d’abord, si l’on fait le bilan de la séance d’hier, il faudra retenir que ça aura été une sale journée pour le secteur technologique et tout cela pour des raisons diverses et variées. La première chose qu’il faudra retenir, c’est que le secteur des semi-conducteur s’est fait massacrer hier. Enfin, massacré, c’est vite dit, mais disons que c’est toujours plus vendeur journalistiquement parlant que « légère prise de profits ». Le SOX reculait de 2% – ce qui pour lui ne représentent pas non plus la fin du monde, mais mis en rapport avec le reste, ça tapait plutôt fort. D’un point de vue plus « technique », si on l’utilise comme indicateur avancé, on dira qu’il a refusé de retourner au plus haut de tous les temps et que l’on pourrait envisager une correction de quelques jours.

Mais la question que l’on pourrait se poser est : mais pourquoi cette pression vendeuse sur le secteur ? Surtout qu’hier un des plus gros BEAR sur AMD a enfin tourné la veste et a passé son objectif de 17$ à 95$ – comme quoi le ridicule ne tue pas, l’analyste en question étant toujours vivant à la clôture d’hier soir. Pourtant tout le secteur était en difficulté et ce, malgré le fait qu’Intel soit sur le point de faire un chèque de 30 milliards pour racheter Global Foundries – ne cherchez pas sur vos systèmes, le titre n’es pas coté – ces « bonnes nouvelles » ne suffisant pas, la raison était ailleurs. Et la raison s’appelle Taïwan Semi’s – la société a publié hier des chiffres qui étaient meilleurs qu’attendus et ça n’était donc pas là le problème. Non, le problème qui aura mis le secteur à terre hier réside dans le fait que la société Taïwanaise a confirmé que le « shortage » de semi-conducteurs restait toujours un problème et ne montrait pas franchement de signe d’amélioration.

Alors si vous cherchiez la raison de la baisse d’hier sur le secteur « technologique », ne cherchez pas plus loin. Ce n’est pas le second témoignage de Powell, ce dernier n’étant qu’un copié/collé de celui de la veille, l’inflation est toujours transitoire et il y verra plus clair à la fin de l’année et d’ici-là, il faudrait voir pour le lâcher un peu et arrêter de croire à chaque discours qu’il va changer la face du monde. Ce n’est pas non plus les prises de profits sur les  GAFAM’s, ni l’annonce du fait que Netflix se lance aussi dans les jeux vidéo en streaming. C’était tout simplement le fait que le « shortage » des semi-conducteurs » refait parler de lui et que l’on prend gentiment conscience que ce n’est pas près de se terminer.

Pour le reste, le pétrole pèse

Pour le reste, les intervenants se sont concentrés sur le pétrole. Il semblerait que les différentes parties qui sont impliquées dans la production et la distribution du pétrole mondial, sont en train de se mettre d’accord et que cet accord pourrait signifier qu’il y aurait – à terme – plus de pétrole à disposition pour mettre dans vos voitures, ce qui devrait donc amener à une baisse du prix du brut. Ne vous précipitez pas dans les stations-services, le prix n’a pas encore été répercuté et il ne le sera JAMAIS, puisque l’on sait tous que les distributeurs finissent toujours d’abord d’écouler le pétrole qu’ils ont acheté plus cher et en ont toujours suffisamment en stock pour attendre que le prix remonte et qu’on en bénéficie jamais. Mais là n’est pas le sujet. Le sujet, c’est que sur cette annonce, le prix du baril a plongé à 71.50, emmenant tout le secteur à la cave avec lui. Sachant que là aussi, lorsque le brut descend, on répercute tout de suite la baisse sur les pétrolières. Ce qui n’est pas valable à la hausse.

Mais bon, je vais arrêter de me plaindre parce qu’à la fin on va croire que je râle tout le temps dès que ça baisse. On retiendra aussi que, pendant que le pétrole se casse la figure, les énergies alternatives aussi. Hier, SiemensGamesa a publié un profit warning massif pour le reste de l’année et le titre s’est pris 14% dans la figure, pendant que, par sympathie, le titre Siemens Energy reculait de 8%. Comme quoi, il n’y a pas de justice ; le jour où le pétrole va mal, le reste qui ne pollue pas, va mal aussi. En conclusion ; du côté macro les choses se sont relativement bien passées, Powell reste droit dans ses bottes, les Jobless Claims ont matchés les attentes des analystes, ce qui est assez rare pour être signalés et les autres chiffres étaient moins forts que le mois passé, mais restaient relativement « bons », corroborant la théorie comme quoi la croissance a probablement fait son top au mois de juin. Enfin,  surtout jusqu’à qu’on nous dise le contraire.

Tentative de fin d’hibernation pour certains ours

À la fin de cette journée et à l’aube de celle qui nous attend, je suis obligé de constater que ce matin les médias font la place belle à un certain négativisme latent. Alors je ne sais pas si c’est à cause du fait que « pour une fois » les bourses mondiales baissaient de concert – sauf le Dow Jones – mais en même temps qui suit encore le Dow Jones ? – ou alors est-ce que c’est simplement dû au fait qu’il y a vraiment des trucs qui sont en train de « coincer » dans les fondamentaux et que l’on serait au bord du gouffre sans que l’on s’en rende compte. Il y a deux points qui semblent valoir la peine d’être observés.

Le premier c’est le fait que plusieurs « gros titres », les GAFAM’s pour ne pas les citer, sont en situation claire de sur-achat. Rien qu’en observant les graphiques, instinctivement on se dit que ça ne peut pas continuer comme ça et qu’il faudrait un bon sell-off, voir une correction de quelques semaines pour revenir à des niveaux techniques cohérants et des RSI qui ne sont pas à 80 ou 90%. Et autant vous dire que si l’on commençait à s’attaquer aux GAFAM’s à la vente – comme on l’a fait à la fin du mois d’août dernier lorsque l’on a découvert la fameuse baleine qui était plein de calls et de puts dans tous les sens, Apple avait quand même perdu 25% et le Nasdaq 13.

À bout de souffle

L’autre sujet c’est le « breath » qui commence à sentir mauvais. Le « breath » c’est ce que l’on pourrait traduire par « le souffle du marché » et là, tout de suite, médicalement parlant, c’est assez asthmatique et on a des raisons de s’inquiéter de la suite. Il faut reconnaître que c’est un aspect que l’on ne regarde que très peu dans le monde merveilleux de la finance. Tout d’abord parce que peu de personnes le comprenne et donc tout le monde s’en fout. Cependant, on se rend compte souvent après coup, que si on avait fait attention, ça aurait pas mal fonctionné.

Donc le « breath » du marché c’est le nombre de titres qui font des nouveaux plus hauts et des nouveaux plus bas, pendant que le marché lui bat des records à la hausse ou à la baisse. En l’occurrence, on dira que le marché est très fort si vous battez des records à la hausse et que la majorité des titres font pareil. Ce que nous avons vécu entre le printemps et l’été dernier. En revanche, lorsque le marché bat des records – comme nous le faisons en ce moment et qu’une majorité de titres affichent des performances négatives, voire merdiques, on dira qu’il y a une divergence et qu’il y a quelque chose de pourri au Royaume de Wall Street. En l’occurrence, ces derniers jours le «souffle du marché » est tellement mauvais que la dernière fois que l’on avait eu des divergences pareilles, c’était en octobre 2018. Trois mois plus tard, nous étions 25% plus bas.

Alors oui, il est vrai que c’est différent, parce que cette fois c’est pas pareil. En 2018, Powell était venu nous sauver à Noël en disant qu’il ferait « Whatever it takes » pour nous aider et que cette fois, il l’a dit AVANT. Reste à se poser la question et se demander honnêtement si ça suffira. Ajoutez à cela que trouver un Bear sur le marché devient de plus en plus compliqué, alors que tout le monde se rassure en se disant que la FED sera toujours là. Non seulement on se rassure, mais on s’en convainc également. Les Bull/Bear indicators pointent en direction des bêtes à cornes et la volatilité est dans le coma. Et je vous épargne le concept de l’hyper-spéculation et du fait que tout le monde veut quitter son job pour devenir trader.

Je déteste dire ça, mais ça ressemble quand même à une « perfect storm », une tempête parfaite où toutes les étoiles sont alignés pour que l’on s’en prenne plein la gueule. La question reste de savoir QUAND est-ce que le vent le soufflera et quand est-ce que l’on repartira…à la baisse. Enfin… Nous sommes le 16 juillet et je vous le dis solennellement, il y a un truc de pourri qui pue dans la maison Wall Street. Je ne sais pas si ça sert à quelque chose, mais si on se prend 30% dans les dents d’ici Noël, j’espère qu’il y en a un ou une d’entre-vous qui se souviendra que je l’ai dit, histoire que je sois engagé pour donner des conférences à 10’000 balles sur la fin du monde, pas qu’il n’y ait que Roubini qui profite.

En live et en couleur

Ce matin le Japon est en baisse de 0.9%. Le Hang Seng monte de 0.45% et la Chine ne fait rien. On voit bien que l’on sait clairement où l’on veut aller. D’un côté, si l’on se raccroche aux chiffres chinois on se rend compte que le recovery post-covid est toujours vivant, mais si l’on se raccroche aux chiffres du COVID lui-même, on se rend compte que lui aussi est encore vivant. Les mises en garde, les débats sans fin sur les bienfaits du vaccin ou sur ses travers et les épuisantes discussions pour savoir ce qu’il faut faire, ce qu’il faudrait faire ou ne pas faire et sur ce que l’on aurait fait si on avait fait politique ou médecine, démontrent clairement que l’on n’est pas vraiment sorti de l’auberge et même si les pro-vaccins et les anti-vaccins ont tous vu la lumière et ont tous compris les enjeux après une formation accélérée à l’école Zuckerberg, on voit bien que le marché hésite et se demande s’il n’a pas anticipé un peu vite et un peu trop haut certaines choses. L’or est à 1830$, prêt à bondir pour servir de valeur refuge et les crypto-monnaies se font déglinguer un peu tous les jours, mais tout le monde trouve ça normal, puisque c’est un « sain » retracement depuis les plus haut du début de l’année. Le problème, c’est que « techniquement », ça peut retracer un bon bout en bas de la falaise et que si on n’est pas formé au base-jumping, l’atterrissage risque de se faire dans les arbres dans le meilleur des cas et dans les rochers dans le pire…

Autrement, les tensions entre les USA et la Chine ne s’améliorent pas, ce qui va sûrement aider les investisseurs à se repencher sur les titres chinois. Les organismes de rating sont en train d’upgrader dans tous les coins alors qu’ils se rendent compte qu’ils ont « sous-estimé » la rapidité du recovery. Comme si une fois dans leur vie ils avaient anticipé quelque chose correctement. Et puis autrement Yellen pense que l’on va encore avoir quelques mois d’inflation rapide avant que ça se calme et elle s’inquiète pour le marché immobilier. Moi je me demande ; est-ce que Madame Yellen se rend bien compte qu’elle n’est plus Chairman de la FED, mais Secrétaire du Trésor ? Non, parce que par moments, j’ai des doutes. Notons encore que Goldman Sachs pense que le variant Delta va impacter la croissance en Asie et que ce vendredi nous aurons la triple échéance des options et des futures. À chaque fois on se dit qu’il pourrait se passer un truc et il ne se passe rien, mais je vous le dis quand même.

Chiffres du jour

Pour les données économiques du jour, c’est vendredi c’est donc plus léger. Il y aura néanmoins, le CPI en Europe ainsi que le Trade Balance. Aux USA ça sera les chiffres de la confiance du consommateur qui veut acheter un lave-vaisselle selon l’Université du Michigan, ainsi que les Retail Sales. Côté chiffres du trimestre, c’est assez light avec Ericsson, Charles Schwab ou State Street, par contre la semaine prochaine, ça va chauffer. Enfin, ça va commencer à chauffer, mais on y reviendra lundi, je ne vais pas griller mes cartouches, sinon j’aurais plus rien à dire.

 

Les futures sont inchangés et l’excitation est à son comble. Je vous souhaite un excellent vendredi, un excellent week-end et on se dit : À LUNDI !

Thomas Veillet

Investir.ch

 

“The Best Way To Get Started Is To Quit Talking And Begin Doing.” – Walt Disney