Le Docteur Pol Fabre-Boiseau, spécialiste de la médecine du travail alerte les autorités quant aux risques qu’encourent les travailleurs du secteur financier confrontés durablement à une courbe de rendements inversée.
Quel est précisément le problème de santé auquel les travailleurs de la finance seraient exposés?
Dr P. F-B : La base du problème est ce qu’on appelle l’accoutumance neuronale. Il s’agit d’un mécanisme normal au niveau du cerveau humain qui induit chez tout individu un sentiment de sécurité lorsque l’environnement dans lequel il évolue est stable. A l’inverse, lorsque l’environnement change brutalement, le cerveau génère une série de signaux d’alerte. Il s’agit d’un mécanisme naturel de préservation des espèces qui est programmé dans la partie reptilienne de notre cerveau.
Dans le cas présent, le risque est celui d’une inversion prolongée de la courbe des rendements qui générera dans le cerveau de certains individus exposés des signaux d’alerte relativement extrêmes et difficilement gérables.
Comment se manifesteraient ces signaux d’alerte?
Nous serons face aux habituels symptômes de désorientation spatio-sensorielle, similaires à ceux du mal des transports. Schématiquement, l’œil envoie au cerveau une information que ce dernier n’arrive pas à intégrer, ce qui déclenche une série de réflexes allant de la suée abondante à la nausée, voire la perte d’équilibre lorsque les références spatio-sensorielles deviennent trop brouillées.
Face à ces symptômes, ne faudrait-il pas simplement prendre des médicaments contre le mal des transports?
Dans le cadre professionnel, je ne puis que déconseiller cette approche. En effet, le principe actif de ce type de médicament, le dimenhydrinate qui est un puissant antihistaminique, a pour effet de partiellement anesthésier l’oreille interne où se situe le centre de l’équilibre. Ceci permet de contrer les symptômes dus à la désorientation mais entraine également une certaine somnolence chez le sujet.
Typiquement dans les milieux financiers, ce sont les gestionnaires et traders qui sont les plus exposés à des graphiques de courbe inversée. Une somnolence induite par le médicament pourrait diminuer leur niveau d’attention et amplifierait assez fortement les risques de voir ce que les professionnels nomment «fat finger», autrement dit, des risques d’erreur extrêmes lors de passages d’ordres, donnant lieu à des flash crash sur les marchés. Dans de telles situations, la responsabilité de l’employé serait engagée vu qu’il a volontairement travaillé sous l’emprise de médicaments aux effets secondaires connus.
Quelles seraient dès lors vos recommandations?
Tout d’abord, il s’agira d’identifier les sujets sensibles à ce type de désorientation spatio-sensorielle. La procédure que je recommande sera de faire appel à des collègues – et si possible au médecin ou secouriste de l’entreprise – qui observeront attentivement l’apparition des symptômes lorsque le sujet cobaye affichera sur ses écrans des graphiques de courbe inversée. Je conseillerais de ne pas s’arrêter à un seul modèle mais d’en tester plusieurs et également d’utiliser les fonctionnalités de zoom sur les sections concernées de la courbe afin d’accélérer l’apparition des symptômes.
Et à quels symptômes faudra-t-il être particulièrement attentif lors du test de dépistage?
Le sujet sensible à la désorientation pourra avoir tendance à se pencher exagérément, son cerveau essayant instinctivement de repositionner le corps dans l’axe habituel d’observation de ladite courbe. Ceci entrainera une perte d’équilibre et ses collègues devront être attentifs à lui éviter tout risque de chute. Certains sujets sensibles arriveront néanmoins à lutter contre la perte d’équilibre mais apparaitront alors d’autres symptômes, telle la forte sudation, la dilatation pupillaire ou l’augmentation de production salivaire préalable à la nausée. Dans le protocole de test, il faudra donc veiller à inclure un petit sachet du type de ceux que l’on trouve dans les avions.
Pensez-vous que beaucoup d’employés pourraient manifester ces symptômes d’hypersensibilité à une inversion de courbe?
Les statistiques nous montrent qu’un individu sur 50 est sensible à la désorientation spatio-sensorielle. Au niveau du secteur financier, nous observerons certainement une probabilité plus élevée, les employés ayant subi de forts stress depuis la crise de 2008, ce qui les rend plus vulnérables à ce type de stimuli. À la suite de l’inversion observée le 22 mars, plusieurs cas ont déjà été recensés dans les principaux centres financiers. Nous faisons donc face à un risque de pandémie au niveau mondial.
Par ailleurs, il faut préciser que les sujets ayant rencontré des situations similaires d’inversion de courbe par le passé se subdivisent en 2 catégories. D’un côté ceux chez lesquels l’hypersensibilité a déjà été diagnostiquée, ils devront contacter leur médecin traitant afin de se faire mettre en arrêt maladie.
Pour les autres sujets qui n’auraient pas démontré de symptômes lors de mises en situation précédentes, il est important de ne pas tirer de conclusions hâtives. En effet, différents facteurs sensibilisants ont évolué avec le temps, à commencer par l’âge du sujet, mais également la technologie, les écrans plus grands et plus nombreux pouvant accroitre la sensibilité chez certaines personnes que l’on pouvait penser insensibles au phénomène. Il s’agira donc de dépister toute la catégorie d’employés à risque.
Le Dr. Pol Fabre-Boiseau a averti les autorités compétentes, espérant qu’une alerte sanitaire sera rapidement émise et que des protocoles systématiques de dépistage seront mis en place dans toutes les sociétés concernées.
Cette nouvelle est bien entendu un poisson d’avril.
Pol Fabre-Boiseau est l’anagramme de Fabio Lopes Abreu qui a eu l’idée de cet article.