Depuis que l’on a inventé la bourse, le mois de décembre est généralement un bon mois. D’abord parce qu’il y a plein d’apéros de fin d’année et qu’ensuite c’est la saison du Christmas Rally qui fait monter les actions parce ques les gérants ils veulent montrer plein de jolies actions achetées pas chères dans les portefeuilles de leurs clients.

L’Audio du 10 décembre 2018

Sauf que pas cette année.

Non, cette année on a décidé de se faire mal jusqu’à Noël. Il y a bien quelques traders plein d’espoirs qui se raccrochent encore au fait que le meeting de la FED pourrait tout changer dans une semaine. Mais franchement autant espérer que Superman et Batman se mettent ensemble pour empêcher les marchés de tomber.

Je trouve d’ailleurs effarant cette année notre obsession à trouver LE TRUC qui va nous changer la vie. Il y a eu la Corée, puis il y a eu les “mid-terms”, puis les discussions avec Xi Jinping et maintenant on est obsédé par le fait que la CFO d’Huawei soit en taule, mais avant on avait été boulversé par le fait que Powell soit “un peu moins motivé” à monter les taux… Et puis là, soudainement on se dit que la FED pourrait tout changer dans 10 jours.

Regarder l’horizon

Il serait peut-être temps que l’on commence à regarder un peu plus loin que la pause-café de 9h30 et que l’on pense aussi a investir pour dans 5 ou 6 ans plutôt que pour les 6 prochaines minutes.

La semaine dernière aura été horrible. La plupart des marchés se sont donc fait défoncer, 5.6% de baisse sur le Dow Jones, 6.3% sur le Nasdaq, près de 6% à Francfort, plus de 6% à Tokyo et 4.7% à Paris. Même la Suisse perdait plus de 4%.

C’est vite vu, sur la liste des “grandes places de bourse”, il n’y a rien qui est en terrain positif. Mis à part l’or, mais l’or c’est pas pareil.

Pas fini

Et quand on voit la tronche des futures ce matin, on peut se dire que ce n’est pas fini. L’ambiance est pourrie et tout le monde s’attend au pire. Entre la FED qui pourrait nous lâcher, Trump qui pourrait se fâcher avec la Chine (ah oui, parce que le moratoire de 90 jours on peut déjà se l’accrocher derrière les oreilles, tout le monde s’en fout).

On se dit aussi que si les Canadiens ne libèrent pas la fille du patron d’Huawei, les Chinois pourraient bien commencer à s’énerver autrement que via les tarifs douaniers – une bonne guerre pour de vrai, ça ferait du bien pour conclure la récession dans laquelle bientôt 80% des gens pensent que nous allons…

Oui, parce qu’il ne faut pas oublier non plus que nous sommes dans une période où la courbe des taux est en train de s’inverser. Et quand la courbe des taux s’inverse c’est (presque) toujours un signe de récession à venir.

Devenez-membre aujourd’hui et payez votre voiture moins chère plus tard… ou demain.

Inverted Yield Curve (trop classe comme nom)

Nous avons donc trouvé un nouvel indicateur qui marche “à coup sûr”. Le même genre d’indicateur qui nous disait que le marché allait aller 75% plus bas alors qu’il était au plus bas de 2009. Le même indicateur qui nous disait que “c’est sûr” le pétrole va à 10$ – le même que l’on a réutilisé pour nous annoncer que le baril allait à 100$ pour Noël. CE NOËL, pas celui de 2026.

La certitude que la courbe inversée est annonciateur de récession est donc la nouvelle mode.

Ce qui est bien, c’est que du moment que l’on constaté la chose, on a l’impression que le marché veut IMMÉDIATEMENT “pricer “ la chose.

– inversion de la courbe
– paf, 10% de correction en 2 semaines, comme ça le terrain est préparé.

Autant tout vendre, comme ça quand la récession nous atteindra, on sera déjà prêt.

SHORT NOW !!!

C’est un peu comme si tu vendais tout ton matériel de ski parce que tu sais qu’avec le réchauffement climatique, tu ne pourras plus skier dans 20 ans, alors ça ne sert plus à rien.

Oui, parce que pendant que tout le monde s’ouvrait les veine avec du verre pilé en observant l’inversion de la courbe des taux, certains se sont tout de même penchés sur le concept. ALORS OUI C’EST VRAI; l’inversion de la courbe des taux EST UN INDICATEUR DE RÉCESSION qui fonctionne plutôt pas mal.

Sauf que…

Oui, sauf que l’arrivée d’une récession n’est généralement pas agendée LE LENDEMAIN de l’inversion de la courbe. En général c’est entre 9 et 69 mois plus tard. Avec une moynne de 27 mois.

Alors étant donné notre vision ULTRA-MEGA-COURT-TERME de la finance actuellement, c’est comme si je vous disais que la prochaine récession est agendée pour l’an 2914 et que ce matin vous vous mettiez “short”, juste pour être prêt au cas où.

Bref, si j’étais psy je mettrais les bourses mondiales en arrêt de travail, parce qu’elles sont clairement en Burn-Out.

Vivement ce soir

Ce matin les chiffres économiques sont mauvais au Japon, la croissance est toute pourrie, si ça se trouve il n’y en a pas et le Nikkei dévisse de 2.2%, comme c’est la mode partout ailleurs.

Hong Kong recule de 1.4% et la Chine de 0.8%, il faut dire que les chiffres économiques chinois n’étaient pas bons non plus, puisqu’en plus de la Trade War qui devrait reprendre de plus belle tout soudain, du fait que l’héritière de Huawei soit en taule au Canada, obligée de manger du caribou, il y a aussi le fait que les chiffres des exportations chinoises n’étaient pas bon et que la c’est sûr, on est foutu.

Ce qu’il y a de bien de nos jours, peu importe les nouvelles, on est tellement fort en anticipation, que l’on intègre absolument tout dans les prix dans la seconde qui suit. Même les trucs qui auront un impact APRÈS la prochaine ère glaciaire.

Nouvelles neuves qui vont tout changer

Dans les nouvelles du jour, hier soir Elon Musk était invité dans l’émission 60 minutes et il s’en est encore pris à la SEC qui sont méchants avec lui et à tout ceux qui n’ont rien compris à son business model, ni à celui de Tesla d’ailleurs. Rien que du très grand classique made in Elon Musk.

Par contre pas de pétard ou de whisky hier.

Autrement, le chef économiste du FMI est venu nous dire que “selon lui”, l’économie américaine était prête à ralentir. Probablement à cause de l’inversion de la courbe des taux.

BREXIT, BREXIT, BREXIT, BREXIT, BREXIT (fatigué)

Et puis demain il y aura le vote du BREXIT, ça nous permettra au moins de parler d’autre chose que des conditions de détention au Canada et du fait que la Chine convoque l’ambassadeur américain pour protester contre l’arrestation de la fille de… Ce qui est drôle quand même, c’est que c’est les Canadiens qui l’on arrêtée et que c’est les Américains qui sont convoqués à Pékin, comme si le Canada n’était qu’un autre état dépendant de Trump.

Et puis en France, mis à part qu’Erdogan condamne les violences policières, le Roi Macron va s’adresser à ses sujets ce soir à 20h pour essayer de calmer les gilets jaunes. À moins qu’il annonce sa démission, ça ne suffira pas.

Par contre, si jamais, Sarkozy a fait savoir qu’il était prêt à revenir en cas de besoin. Incroyable, le gars il a une place de parking à l’année devant le tribunal, il y est plus souvent que les juges, mais il voudrait revenir au pouvoir…

Surtout ne pas rire.

Le Bear Market est à nos portes

Autrement les futures sont en baisse de 0.7% ce matin. Visiblement la bonne ambiance continue. La société Ned Research nous annonce que le Bear Market est là et prévient que les actions vont encore baisser de 20%.

Pas 19.5%, pas 18.7%, pas 21.6%, NON ! 20%… tout rond. La finance est un métier de chiffres. Un métier de précision qui ferait passer les horlogers suisses pour des bricoleurs du dimanche. Ce qui est bien dans la finance, c’est que NOUS, on sait.

On sait toujours mieux après, mais avant on est très fort aussi.

Je ne vous fait donc pas un dessin, pour l’instant ça n’a pas l’air franchement mieux que la semaine dernière, sauf qu’il fait plus froid. Là tout de suite, je suis assez tenté d’allumer un feu de cheminée et de retourner me coucher en attendant le soleil et la neige, histoire de faire quelque chose de constructif…

Passez tout de même une excellente journée et rassurez-vous, dans 14 jours c’est Noël et ça nous fera des vacances.

Thomas Veillet
Investir.ch

« A celebrity is a person who works hard all his life to become well known, then wears dark glasses to avoid being recognized. »
-Fred Allen